Cette intervention examinera la présence et l’impact du genre de musique populaire algérienne appelé chaâbi à Paris. À partir d’une enquête ethnographique, je montrerai comment la performance de cette musique en France crée et maintient une identité culturelle distincte qui est imprégnée de nostalgie et au même temps placée dans les réalités actuelles de la vie en diaspora. En utilisant les théories de la mémoire multidirectionnelle, du rituel et de la nostalgie, ma recherche explore la capacité des expériences performatives communales de construire et transmettre les notions de patrimoine commun, traversant ainsi les ruptures de l’espace et du temps. Le chaâbi est apparu pendant la première moitié du XX
e siècle, issu d’un mélange entre la poésie maghrébine
melHûn et la musique arabo-andalouse. Entre la Première Guerre mondiale et l’indépendance de l’Algérie, les sons de cette musique ont résonné dans presque tous les cafés de la Casbah à Alger. A la fois accessible et innovant, et enraciné dans les traditions régionales, le chaâbi représentait la réalité en évolution en Algérie. Le chaâbi a été transformé par les influences culturelles étrangères, une crise d’identité sous l’action du gouvernement colonial, ainsi que des changements démographiques massifs qui ont donné lieu à la croissance des centres urbains. De plus, le développement de chaâbi a correspondu au pic de l’immigration algérienne en France pendant les années cinquante. Cette musique contient ainsi des évocations poignantes de la terre natale pour cette génération des immigrés, dans lesquelles une époque particulière est opposée de manière nostalgique aux années à l’étranger. Pour les générations suivantes, l'intérêt soutenu pour cette musique témoigne d'un désir répandu de se rapprocher d’un patrimoine culturel distinct, au sein d'une double subjectivité franco-algérienne.
Christopher Orr est doctorant en musicologie à la Florida State University, boursier de la bourse Chateaubriand de l’Ambassade de France aux États-Unis, et rattaché au CREM comme chercheur extérieur pour l’année 2016-2017.
The CREM (Centre for Research in Ethnomusicology) seminar takes place on two Mondays per month, from 10:00 to 12:00. Members of the CREM (doctoral students included) and invited researchers present their ongoing work. The presentations last 50 minutes, and are followed by a coffee break and discussion hour.
Occasionally, the seminar takes the form of a workshop which brings together several researchers around a common theme. In these cases, the seminar takes place over an afternoon, or sometimes an entire day.
Participation in the seminar is open to everyone. It is also integrated into the Master’s degree in ethnomusicology at the Universities of Paris Nanterre and Paris Saint-Denis.