[English version below]
Les recherches d'E. Grimaud portent sur les frontières de l'humain, de la communication, de la perception, de la technique, de la mesure. Elles relèvent globalement de l’anthropologie de l’innovation, des sciences et des techniques (STS) et l'ont conduit à faire du terrain entre l’Inde, le Japon et l’Asie du Sud Est. Il s'est intéressé à des domaines éclectiques, de l'organisation du travail dans les studios de cinéma (Bollywood film studio, 2003) aux fouilles archéologiques (Archéologie et ventriloquie, 2013), de la biographie d’un sosie de Gandhi (Le sosie de Gandhi ou l’incroyable histoire de Ram Dayal Srivastava, 2007) à l'animatronique des dieux en Inde (Dieux et robots, 2008), des laboratoires de robotique au Japon (Le jour où les robots mangeront des pommes, 2012) aux relations homme animal en Thaïlande (Insect magnetism, avec S. Rennesson, 2012), de la conduite en Inde et les problèmes de coordination collective (Figures du trafic, 2010) au mouvement oculaire (Le point de vue de la pupille, 2015), l'histoire des caméras embarquées et les points de vue de « non humains » en anthropologie (From the squid’s point of view, 2015), les systèmes de prédiction et les techniques de divination astrologiques (L'étrange encyclopédie du docteur K, 2014), les machines à mesurer l'énergie vitale, les auras et les controverses autour de la mesure des ondes (La face obscure de la clairvoyance, 2019), les techniques d'hypnose et les expériences de vies antérieures (Renaître en temps réel, 2016), les chasses aux fantômes (ghost hunting) et les machines paranormales (La Singularité fantôme, 2019) et, plus récemment la bioacoustique terrestre et la radio-astronomie.
E. Grimaud a mis en place de nouvelles formes d'enquête spécifiquement anthropologiques sur des objets particulièrement difficiles à capter, soit parce qu’on manque d’outils pour le faire (les mouvements oculaires par exemple) soit parce qu’ils sont ambigus ou plongent les sceptiques dans des abîmes de perplexité (les influences astrales, l’aura, l’énergie vitale, par exemple), obligeant ceux qui veulent les mesurer à concevoir des instruments controversés ou des machines ésotériques. Ces travaux sur les frontières de la technosphère sont indissociables d’une réflexion épistémologique sur la notion d’expérimentation (voir hdr, Les plans-limites d'expérience. Penser avec et par-delà la vallée de l'Etrange, UPN, 2018) (Atelier Expérience-Limite)
Sur le plan méthodologique, il a principalement consacré ces dernières années à monter des expériences ou des dispositifs à l’interface entre l’anthropologie et d’autres domaines (robotique, psychologie expérimentale, etc.). Il a conçu avec Zaven Paré une interface robotisée du dieu hindou Ganesh, Bappa 1.0, qui permettait de se mettre à la place d'un dieu et de tenir une conversation (Ganesh Yourself, film, Rouge International / Arte, 2016 et manuscrit Dieu Point Zéro, une anthropologie expérimentale (PUF Métaphysiques, mai 2021, sous presse) et, plus récemment, un dispositif croisant chasse aux fantômes et hypnose collective pour faire une anthropologie des invisibles au Bengale (Black Hole, 2019).
Le souci d’ouvrir l’anthropologie à de nouveaux objets dans une perspective pluridisciplinaire et la réflexion épistémologique sur la méthode ethnographique, la nécessité de développer de nouveaux modes de captation et l’usage de méthodes expérimentales en sciences humaines sont des préoccupations essentielles de ses travaux depuis 2003.
Ses recherches ont souvent donné lieu à des films comme le sosie de Gandhi (2001), Cosmic City (2008), Les rois du kwaang (2009) sur les matches de scarabées en Thaïlande, Eau Trouble (2011) sur les combats de poissons, Ganesh Yourself (Arte, 2016) ou encore Black Hole, why I have never been a rose (Moving Ahead, Locarno, Prime spéciale du jury du Festival Jean Rouch, 2019).
E. Grimaud a coordonné de nombreux volumes collectifs, notamment Effets Spéciaux (avec S. Houdart et D. Vidal, 2006), Virtuosité ou les sublimes aventures de la technique (avec G. Jones et V. Stoichita, 2011), Robots étrangement humains (avec D. Vidal, 2012), Jouir ? (avec A.-C. Taylor et A. Giard, 2017), Low tech/Wild tech (avec D. Vidal et Y.-P. Tastevin, 2017), Estrangemental (avec P. Déléage, 2019). Il a été commissaire de l’exposition Robo-Garage (Centre d’art contemporain d’Enghien Les Bains, 2007), de l’exposition Persona, étrangement humain (Musée du Quai Branly, 2016) et prépare une autre exposition intitulée EXO2 sur les futurs post-anthropocène.
E. Grimaud a pris la direction scientifique et technique du labex Passés dans le Présent / Histoire, patrimoine, mémoire (PdP, ANR, UPN/UP8) depuis 2018.
Thématiques de recherche:
Anthropologie des techniques
Frontières de la technologie, de l’humain, de la perception, de la mesure, du vivant
Expérimentation et société
Approches pragmatiques de l’expérience et dispositifs expérimentaux
Cinéma, captation et formes expérimentales d’écriture en SHS
Emmanuel Grimaud’s research explores the borders of humans, communication, perceptions, techniques, and measurement.
In his HDR, the Plans-Limites d’Expérience (2018), he pulls inspiration from the Uncanny Valley theory, developed by Japanese roboticist Masahiro Mori, to re-centre the undetectable, enigmas, and perceptive dead angles in the field.
Indianist in training, Grimaud wrote his thesis under the direction of Charles Malamoud, before enlarging his field studies well beyond his original domain. He is credited with one of the first truly immersive ethnographies in a film studio, where he worked as an assistant directory (Bollywood Film Studio, 2003), then an exploration of the psychedelic animatronics of Hindu deities (Dieux et robots, 2008), but also troubling investigations such as a biography of a Gandhi lookalike (Le sosie de Gandhi ou l’incroyable histoire de Ram Dayal Srivastava, 2007), a series of quirky experiments with Zaven Paré around a Japansese humanoid (Le jour où les robots mangeront des pommes, 2011) or still the study of and Indian astrologist’s techniques, capable of drawing individual’s faces, never having seen them, just based off of their horoscope (L’étrange encyclopédie du docteur K, 2014). He has furthermore led an ethnography of an archaeological dig (Archéologie et ventriloquie, 2013) of an intersection without lights (Figures du traffic, 2010), a study of ocular movement (Le point de vue de la pupille, 2015), fights between beetles (with S. Rennesson, Insect magnetism, 2012), a story of onboard cameras (From the squid’s point of view, 2015), wave and aura measuring machines (La face obscure de la clairvoyance, 2019), a study on the techniques of hypnosis and the experiences of past lives (Renaître en temps reel, 2016), or still ghost hunting in Calcutta (La Singularité Fantôme, 2019).
Based on the principle that anthropology is an ignored experimental science, he argues for the invention of other modes of study, from restitution even to the development of singular experimental protocols. Zaven Paré did just this when he designed a robotized interface of the god Ganesh, Bappa 1.0, which allows anyone to put themselves in place of a god and hold a conversation (Ganesh Yourself, Arte/La Lucarne, 2016). His research often results in films such as La Sosie de Gandhi (2001), Cosmic City (2008), Les Rois de Kwaang (2209) on the beetle matches in Thailand, Eau Trouble (2011) on fish fights or even Black Hole (in production, 2019), which brings together hypnosis experiments and ghost hunts in Calcutta.
He coordinated many collective volumes, including Special Effects (2006), Virtuosité ou les sublimes aventures de la technique (2011), Robots étrangement humains (2012), Jouir ? (2017), Estrangemental (2019). He curated the Robo-garage exhibit (Contemporary Art Center Enghien Les Bains, 2007) and the exhibit Persona, strangely human (Quai Branly Museum, 2016).
Directeur scientifique et technique du Labex Passé dans le Présent (PdP), depuis 2017
Ce monde en cache-t-il un autre ? Et si notre réalité déréglée n’était qu’une réalité parmi d’autres, encore plus défaillantes ? Et que faire quand il ne restera plus aucun monde ou que nous les a...
Ce catalogue, qui accompagne une exposition qui se tiendra au musée du quai Branly du 26 janvier au 13 novembre 2016, s’intéresse aux mécanismes par lesquels un objet accède à un statut de "personne" et peut se transformer en être animé, alors qu’il n’est constitué que de matière inerte. Il s’agit de comprendre les caractéristiques formelles et les dispositifs situationnels dont jouent les cultures les plus diverses, y compris la nôtre, pour injecter de la "personne" dans des objets. Il présente des essais et des pièces de l’art occidental ou non occidental, d’art populaire ou d’art contemporain. Il confronte aussi le lecteur à des objets empruntés aux domaines des nouvelles technologies, au design et à la robotique.
Quel que soit l’objet auquel elle s’applique – un tour étonnant, un motif compliqué, un solo très rapide, une acrobatie dangereuse, une machine particulièrement douée pour accomplir certaines opérations –, la virtuosité évoque une forme d’autonomisation et d’autocélébration de la technique, en même temps qu’une part de sublimation ou de dépassement de celle-ci. En empruntant des exemples à des univers qui sont rarement confrontés, ce numéro vise à montrer en quoi les « faits de virtuosité » permettent de penser de manière nouvelle la relation entre l’art et la technique. Contributeurs : Emmanuel Grimaud, Aurélie Helmlinger, Antoine Hennion, Graham Jones, Denis Laborde, Zaven Paré, Stéphane Rennesson et Denis Vidal
Des gens m’ont dit qu’ils avaient l’impression croissante de vivre dans un roman de Philip K. Dick. Plusieurs dingues m’ont même accusé d’avoir fait advenir le monde actuel avec mes romans.(Dick 2016 [1974-1982] : 52) Notre époque a un goût bizarre de science-fiction et, par un drôle d’effet de convergence, l’ethnographie semble à son tour s’en rapprocher toujours plus. L’altérité a changé de forme. Les indigènes des anthropologues ne sont plus ce qu’ils étaient. Les astrobiologistes spéculen...
On ne compte plus aujourd'hui les appels à repenser l'innovation. Il y aurait urgence écologique. Et certains n'hésitent pas à prédire la fin du monde à moins d'une rupture radicale de nos modèles de croissance. Alors que chaque nouvelle génération de téléphone ou d'ordinateur est célébrée comme si elle constituait un progrès décisif pour l'humanité, le low tech à l'inverse, cet ensemble hétérogène de techniques, de modes de composition alternatifs, définis tantôt négativement (pauvreté ou économie de moyens) tantôt positivement (faire beaucoup avec peu de choses, faire avec ce qu'on a, faire plus local et plus participatif, etc.) viendrait partout ébranler la toute puissance du high tech. Avec lui, ce ne sont pas seulement une autre lecture des techniques et d'autres façons de concevoir qui se donnent à voir, mais des population entières d'hommes et de procédés, dont le rôle a bien souvent été sous-estimé, de l'Inde à l'Afrique en passant par l'Asie. L'objectif de ce numéro n'est pas de cataloguer les formes de résistance ou d'invention très diverses que recouvre l'étiquette de low tech, mais plutôt de poser les bases d'une cartographie alternative des modes d'assemblage à l'échelle planétaire, et de donner des outils pour mieux penser des manières de fabriquer qui échappent à toute classification.
On ne compte plus aujourd'hui les appels à repenser l'innovation. Il y aurait urgence écologique. Et certains n'hésitent pas à prédire la fin du monde à moins d'une rupture radicale de nos modèles de croissance. Alors que chaque nouvelle génération de téléphone ou d'ordinateur est célébrée comme si elle constituait un progrès décisif pour l'humanité, le low tech à l'inverse, cet ensemble hétérogène de techniques, de modes de composition alternatifs, définis tantôt négativement (pauvreté ou économie de moyens) tantôt positivement (faire beaucoup avec peu de choses, faire avec ce qu'on a, faire plus local et plus participatif, etc.) viendrait partout ébranler la toute puissance du high tech. Avec lui, ce ne sont pas seulement une autre lecture des techniques et d'autres façons de concevoir qui se donnent à voir, mais des population entières d'hommes et de procédés, dont le rôle a bien souvent été sous-estimé, de l'Inde à l'Afrique en passant par l'Asie. L'objectif de ce numéro n'est pas de cataloguer les formes de résistance ou d'invention très diverses que recouvre l'étiquette de low tech, mais plutôt de poser les bases d'une cartographie alternative des modes d'assemblage à l'échelle planétaire, et de donner des outils pour mieux penser des manières de fabriquer qui échappent à toute classification.
Partant du statut accordé à la jouissance sexuelle dans les sociétés occidentales, cet article a pour objectif de prendre un peu de hauteur par rapport à l’« orgasmolâtrie » moderne et à sa critique. En s’intéressant aux choix opérés dans d’autres mondes culturels, faisant place aussi bien aux conceptions des Indiens d’Amazonie qu’aux dernières inventions japonaises en matière de sextoys ou aux débats suscités par le cybersexe, il envisage de nouvelles clés de lecture sur une thématique qui a déjà fait l’objet d’une abondante littérature. L’objectif est d’ouvrir des pistes de réflexion sur le statut varié accordé à l’expérience de l’orgasme : que doit-on entendre exactement par là et est-il partout envisagé sous les formes que nous lui connaissons ? Lorsqu’on choisit de le cultiver comme moment sensible du rapport entre les vivants, quels types de connexions socio-cosmologiques se trouvent alors développées ?
La past life regression constitue aujourd’hui une forme d’hypnothérapie visant à faire revivre au patient ses « vies antérieures » pour résoudre des traumatismes, des phobies ou tout simplement pour qu’il s’explore lui-même. Peut-on faire une expérience de réincarnation en temps réel ? À quoi le sujet a-t-il véritablement accès lorsqu’il est mis sous hypnose ? Quel statut accorder à ces visions et états de corps qui paraissent si étrangers au sujet lui-même ? Autant de questions controversées qui sont envisagées ici en retournant aux expériences de régression de mémoire menées par le colonel de Rochas à la fin du xixe siècle et resituées dans l’histoire plus large des recherches expérimentales sur la réincarnation.
Il est impossible d’ouvrir un dossier consacré à la robotique sans rencontrer de multiples prophéties annonçant dans un futur proche que nous vivrons entourés de robots anthropomorphes ou zoomorphes et que nous nous machinerons par des voies que nous ne pouvons pour le moment qu’entrevoir. Peut-on envisager une approche de la robotique un peu moins prophétique et donc décevante, un peu plus pragmatique et donc plus surprenante, un peu plus réflexive et donc habitée par un principe de précaution ? Faut-il continuer à faire passer les machines pour autre chose que ce qu’elles sont ou doit-on arrêter de les prendre pour ce qu’elles ne sont pas (des animaux, des humains) ? Faut-il considérer qu’elles constituent un « règne » à part entière, à côté du minéral et du végétal, ou bien faut-il continuer de les reléguer dans l’instrumental, ce grand bazar ? Ce « manifeste » reprend quelques-unes des observations faites par ceux qui, dans le champ de l’anthropologie principalement, observent la « révolution robotique », suivent ses essais d’expérimentation/implémentation et abordent la diversité des interactions homme-machine avec les outils de l’enquête de terrain., Impossible to discuss about robotics without stiring many prophecies announcing that we will live surrounded by zoomorphic or anthropomorphic robots and transform ourselves in ways we can not yet imagine. Is it possible to adopt a slightly less prophetic approach, a little more pragmatic and therefore more surprising, a bit more reflective and thus inhabited by a precautionary principle ? Should we continue comparing or assimilating machines with other kinds of beings (animals, humans) ? Should we accept that they are a « reign » in itself, next to the mineral, the vegetal or should we continue to relegate them into the instrumental, this big bazaar ? This manifesto summarises some of the observations made by anthropologists who observe the « robot revolution » with ethnographic tools, following experimental processes/implementation tests and the very concrete situations of interaction in which robots can be experienced.
L’astrologie possède sans doute en Inde son plus grand laboratoire, si l’on en croit l’éventail exceptionnel de situations dans lesquelles elle se trouve mobilisée. Elle jouit par ailleurs d’une reconnaissance institutionnelle, donnant lieu à des enseignements et des recherches très variées, au croisement de la science, de la médecine et de la divination. Contrairement aux idées reçues, elle possède une dimension expérimentale indéniable. Elle n’a jamais cessé de se réinventer au cours du temps, donnant lieu à de nouvelles formes de connexion aux astres, à un affinement des méthodes de calcul pour anticiper leurs fluctuations et à de nouveaux procédés pour magnétiser autrement tout ce qui nous entoure. C’est plus particulièrement à l’astromorphologie que cet article est consacré et aux techniques utilisées par un astrologue indien pour mesurer les emprises des astres à même le visage et leurs mécanismes d’influence à distance. La consultation astrologique est envisagée ici comme un lieu privilégié où faire des expériences en résonance dont on peut suivre en situation les enchaînements et les implications sur les personnes, modifiant leur rapport au corps et à l’environnement (astromorphose).
Une fouille archéologique est le terrain d’expériences multiples de pensée, « à l’extrême limite de l’identifiable, au presque degré zéro de l’indice, à la frontière du rien » (Cohen 2011 : 83). On tentera de mieux qualifier ces expériences de représentation à partir de quelques situations ethnographiques observées au cours d’une fouille indo-américaine en Inde. Au bord des tranchées, on s’adonne à des expériences ventriloques visant à faire parler des objets muets, à des expériences immersives (dans un monde révolu en trois dimensions), à des jeux de rôle (consistant à se mettre à la place de personnages ayant existé) ou à des expériences optiques sur des objets non identifiés et des figures fictives. Plus les situations limites aux frontières du savoir se multiplient, plus de nouvelles expériences, différentes des précédentes, doivent être tentées. Et plus les fouilles s’ouvrent au public et admettent de nouveaux intervenants, plus le sol devient une surface de projection singulière, une arène d’expression où les énigmes et les points de vue sont mis en partage dans des jeux interactifs dont cet article examine les modalités.
Cet article explore le travail de la main dans les studios d’animation et s’interroge sur le changement de régime de conception impliqué par le recours à l’ordinateur dans un domaine, le dessin animé, où la main reste l’interface privilégiée du tracé. Dans l’histoire du cinéma, les studios d’animation se sont très tôt organisés de manière tayloriste, recourant à un très grand nombre de petites mains afin de réaliser les tâches fastidieuses et répétitives du dessin. Au tournant du XXIe siècle, ces studios se sont de nouveau retrouvés à la pointe de la réflexion managériale sur le type d’organisation à adopter, dès lors que l’ordinateur permettait d’automatiser un grand nombre de tâches. En se situant principalement dans les studios de Bombay qui effectuent aujourd’hui des dessins et des animations à la chaîne pour des maisons de production venues du monde entier, l’auteur s’interroge sur la façon dont la « digitalisation » de la main s’est opérée. L’ordinateur a modifié l’organisation traditionnelle de l’activité d’animation et en particulier le partage entre les « petites mains » (celles des animateurs) et la « grande main » (celle du réalisateur), au profit d’un rapport souvent compliqué entre la main et la machine qui n’est jamais réductible à une simple relation de commande.
Toute interaction avec un robot gagne à être étudiée à l’échelle où l’observe Masahiro Mori, c’est-à-dire comme une cinétique de l’attachement qui peut être suivie en temps réel dans ses fluctuations d’intensité. Mais une interaction avec un robot anthropomorphe n’est-elle réussie qu’à la condition que nous oubliions, à un moment ou à un autre du processus, qu’il s’agit d’une machine ? La question se pose de manière accrue à la robotique lorsque celle-ci se situe sur le terrain des passions. On prendra ici plusieurs exemples (humanoïdes, animaux artificiels, machines érotiques), qui montrent que des liens d’attachement, des jeux communicationnels et parfois même des relations passionnelles peuvent se développer avec des robots, sans qu’il soit nécessaire de les ranger à tout prix et définitivement dans la catégorie « humains » ou « machines ». Et si les échelles de traitement des objets, des êtres, des machines et de leurs hybrides peuvent être très variées selon le contexte où l’on se situe, elles sont souvent bien plus souples, graduées et prêtes à s’ouvrir à des relations troublantes que la vieille opposition de l’humain et de la machine ne le laisserait penser. Aussi la robotique nous invite-t-elle à repenser ce que s’attacher veut dire, avant tout débat sur l’apparence même de ses créatures.
Les roboticiens sont loin de s’accorder sur le rôle que pourraient jouer dans le futur des robots évoquant, par leur apparence ou leur comportement, un être humain. Ceux-là mêmes qui s’entendent sur l’intérêt de concevoir de tels artefacts pensent aussi, le plus souvent, qu’il faut éviter qu’ils soient susceptibles d’être confondus – même provisoirement – avec un humain. Ne voyons pas trop vite, cependant, dans cette réserve l’influence de tabous millénaires, inspirés par les traditions cultu...
Comment des humains et des coléoptères, qui se caractérisent par des capacités perceptives, cognitives et motrices si différentes, parviennent-ils à coordonner leurs actions ? C’est à cette question que l’article répond en se penchant sur le cas des combats de scarabées (kwaang) en Thaïlande, dont le succès populaire repose sur une tentative de coopération improbable. Pour ce faire, il s’attache à décrire les différentes manières dont les joueurs établissent et entretiennent le contact avec leurs insectes. En s’appuyant sur une théorie de la communication élargie aux animaux, il montre comment, malgré l’impossibilité pour les deux espèces de partager des images mentales, des représentations ou encore de se retrouver autour de cadres d’attention conjointe, ils parviennent à coopérer sur la base d’un champ vibratoire, véhicule de signaux dont nul ne peut être certain des effets, ni même qu’ils peuvent être interprétés.
"Situé à la croisée des domaines de l'art, de l'artisanat et de la technique, vecteur de pratiques religieuses et de la culture populaire autant que de recherches esthétiques proprement dites, l'art de la marionnette déborde de toutes parts le carcan des imaginaires collectifs qu'elle mobilise. En étudiant son rôle et ses avatars au cours de l'histoire et dans les sociétés contemporaines, conservateurs, historiens de l'art et du spectacle, anthropologues et artistes interrogent ce champ irréductible à sa seule matérialité. Comment un tel objet a-t-il réussi à entrer dans les musées et de quelle manière lui octroyer la place qu'il mérite dans ce nouvel espace ? La question du statut de la marionnette, au-delà du champ patrimonial, est au coeur de cet ouvrage qui nous dévoile tous les secrets de ce théâtre du monde en réduction." [Source : 4e de couv.]
In Calcutta, Trupti Jayin is a renown hypnotherapist specialized in guiding her patients in their past incarnations. Through these immersions in the remotest folds of the past, she heals distant traumas manifesting in the present lives of her patients. Meanwhile, a group of ghost hunters tracks, with their technological paranormal equipment, the restless spirits that roam in the dark lanes and abandoned buildings of the city. The previous incarnations of the patients and the ghosts of Calcutta meet at several karmic crossroads.
Le robot Bappa est né d'une idée qui semble un peu folle ou provocante: refabriquer un dieu pour questionner la nature des croyances religieuses.
Intelligence artificielle : les humanoïdes nous interdisent de poser les bonnes questions Un entretien avec Emmanuel Grimaud, anthropologue. Docteur
Atelier Expérience-Limite, UPN
Groupe de réflexion sur l'intelligence artificielle, UPN
Atelier Hacking the Invisible, UPL
Direction de masters, M1, M2 et thèses
2017-2020, Hacking the invisible, avec Graham Jones, Peter Bebergal, Gregoire Mayor, MIT-UPL-Neuchâtel
2014-2018, Robotique et frontières de l’humain, Axe de recherche du LESC
2014-2018, Dispositifs et Mesures, PRES Paris Lumière, Axe de recherche du LESC
2014-2016, Toutes époques confondues : reenactment et techniques de simulation, Labex P2P
2009-2011, Aux frontières de la coordination : Carrefours sans feux et Intelligence collective, Fondation Fyssen
2009, An anthropological platform for the study of artificial design processes, ERC (projet retenu dans la 1re phase d'évaluation)
2005-2008, Effets Spéciaux, ANR
2019-2021, Perception de l’Expressivité d’un Essaim de Robots Mobiles (PEERM), avec Elsabetta Zibetti, Université Paris 8 - Vincennes-Saint-Denis EA 4004 CHART-LUTIN (Paris 8/EPHE/Paris 10/UPEC/IUFM Créteil/Cité des Sciences et de l’Industrie), UPL
2014-2017, Objets à comportement, Samuel Bianchini, ENSAD LAB, PRES Paris Lumière/Labex RH2H
2013-2015, For an Observatory of Senses. An anthropological platform for the study of intelligent sensitivities and their social implications (robotics, design, art), ANR
2012-2016, Low Tech / Hi Tech / Wild Tech. Repenser la technologie, avec Denis Vidal (IRD) et Philippe Tastevin (CNRS), IRD