
[English version below]
Dimitris Gianniodis est docteur en anthropologie, qualifié en section CNU 20 (anthropologie biologique, ethnologie, préhistoire) et membre scientifique de l'Ecole Française d'Athènes. Ses recherches actuelles portent sur l'analyse comparée des interactions musicales et dansées des habitants des îles grecques du Nord Est Égéen et des côtes d’Asie Mineure. Il participe au programme de recherche franco-grec « Musée Virtuel Hubert Pernot » dirigé par Christophe Corbier et Georges Kokkonis (2024-2026) visant à la valorisation des enregistrements réalisés par le linguiste Hubert Pernot à Chios en 1898-1899 , ainsi qu’au programme « Les confins de la musique » porté par Christophe Corbier au sein de l’École française d’Athènes (2022-2027).
Sa thèse, soutenue en 2024, portait sur les pratiques musicales et dansées que les habitants des communautés villageoises de l'île grecque de Chios associent à leur « tradition » (parádosi) et mobilisent lors de situations spécifiques telles que les mariages, les fêtes de compagnie, les bals de villages et les festivités de Carnaval. L'hypothèse centrale de la thèse était que ces pratiques musicales et dansées peuvent s'envisager comme des techniques du corps permettant aux musiquants : 1) de s'inscrire dans l'espace-temps social pertinent à leurs yeux, en « sculptant » leur place au sein de leur monde social tant d'un point de vue synchronique que diachronique ; 2) de créer des espaces-temps performatifs en « sculptant » leur place sur la piste de danse par la reconfiguration de l'espace et du temps ; 3) de créer des espace-temps fictionnels et de coordonner leurs imaginaires afin de s'immerger ensemble dans des mondes parallèles et d'ainsi expérimenter des formes d'alternatives à la réalité.
Dimitris Gianniodis holds a PhD in anthropology, is qualified in CNU section 20 (biological anthropology, ethnology, prehistory) and is a scientific member of the French School at Athens. His current research focuses on the comparative analysis of musical and dance interactions among the inhabitants of the Greek islands of the northeastern Aegean and the coast of Asia Minor. He is participating in the Franco-Greek research program “Musée Virtuel Hubert Pernot” directed by Christophe Corbier and Georges Kokkonis (2024-2026), which aims to promote the recordings made by linguist Hubert Pernot in Chios in 1898-1899, as well as the program “Les confins de la musique” (The Frontiers of Music) led by Christophe Corbier at the French School at Athens (2022-2027).
His PhD thesis, defended in 2024, focuses on the musical and dance practices that the inhabitants of village communities on the Greek island of Chios associate with their "tradition" (parádosi) and mobilize during specific situations such as weddings, private and public parties, as well as Carnival festivities. The central hypothesis of the thesis is that these musical and dance practices can be conceived as body techniques enabling musickers : 1) to inscribe themselves in the social space-time relevant to them, by "sculpting" their position within their social world from both a synchronic and diachronic point of view; 2) to create performative space-time by "sculpting" their position on the dance floor through the reconfiguration of space and time; 3) to create fictional space-time and coordinate their imaginations in order to immerse themselves together in parallel worlds and thus to experiment alternative forms of reality.
2022-2023, Chargé de CM « Idées reçues sur la musique » (Introduction à l'ethnomusicologie) L1, Université Paris Nanterre
2022-2023, Chargé de TD « Anthropologie de la musique et des mondes sonores » L2, Université Paris Nanterre
25/10/2022, "Une approche ethnomusicologique du rituel", intervention dans le cours "Controverses en ethnomusicologie", Master d'anthropologie, Université Paris Nanterre
2021-2022, Chargé de TD « Idées reçues sur la musique » (Introduction à l'ethnomusicologie) L1, Université Paris Nanterre
2021-2022, Chargé de TD « Anthropologie de la musique et des mondes sonores » L2, Université Paris Nanterre
2020-2021, Chargé de TD « Idées reçues sur la musique » (Introduction à l'ethnomusicologie) L1, Université Paris Nanterre
14/11/2019, "Les rituels de Carnaval à Chios. Jeux d'identités, brouillage des intentionnalités, pièges à pensée?", intervention dans le cours "Musique, langage et rituel", Master d'anthropologie, université Paris Nanterre
Membre du programme de recherche franco-grec « Musée Virtuel Hubert Pernot » dirigé par Christophe Corbier et Georges Kokkonis, Partenariat Hubert Curien (Institut Français de Grèce - Fondation Hellénique des Bourses d'Etat) (2024-2026)
Membre du programme « Les confins de la musique » dirigé par Christophe Corbier, Ecole française d’Athènes (2022-2027)
Cet article propose de réinterroger la nature des chants narratifs liés à l’épopée de Digénis Akritas et interprétés jusqu’à ce jour sur l’île grecque de Chios en les mettant en relation avec la danse chorale du « lié » ainsi que différents rituels carnavalesques. Les ballades épiques y sont envisagées comme des fictions dramatiques mélodisées et des mises en présence de subjectivités issues d’un passé mythique et leur dimensions musicales et choreutiques comme des techniques de « coordination des imaginaires » et des amorces permettant la mise en place de « feintises ludiques partagées » qui dialoguent avec les nombreuses autres fictions théâtrales mises en place durant la période liminale de Carnaval.
Sur l’île de Chios, dans le Nord-Est égéen, les connaisseurs jugent de la réussite d’une fête de compagnie en fonction notamment de la qualité et du nombre d’énonciations du manés. S’il n’est pas absolument nécessaire au bon déroulement de la fête, ce chant mélismatique improvisé aux parties vocales non mesurées et à l’accompagnement instrumental en 4/4 lui confère une dose d’émotions, un « supplément d’âme » très apprécié, et est le signe que la compagnie est bonne. Mais le manés est-il réellement un genre musical uniforme ? Comment ses diverses performances s’insèrent-elles dans le flux musical de la fête ? Selon quels critères les convives jugent-ils de sa beauté, de sa qualité, de sa rareté ? De quelle manière le manés déclenche-t-il l’empathie des convives et quel rôle joue-t-il dans la transmission et l’appropriation de savoirs relatifs au monde de la fête ? Dans cet article, nous prendrons pour point de départ diverses manifestations de cette forme de chant lors d’une fête de compagnie, afin d’analyser son déroulement-type, ses séquences, passages obligés et attendus, ses imprévus. Cette analyse nous permettra de mettre en évidence le statut fondamental du noceur (meraklís) qui, par la légitimité que lui confère son expérience de la fête et le pouvoir que lui reconnaissent les autres convives, est à même d’agir en tant que « passeur de vécus » et de contribuer à la continuation de la tradition musicale de l’île.
This master thesis focuses on the concept of tradition (parádosi) and on the way the inhabitants of the greek island of Chíos connect it to some of their musical and choreutic practices taking place during religious and secular feasts as well as during dance classes and shows. It questions the manner these practices are built during specific situations using the social constructionist perspective and Bourdieu's habitus and field theory. First an ethnography of these situations allows us to determinate which elements the actors consider to be traditional. It then sheds light on the paradox according to which specific musical and choreutic practices shoud be preserved while the actors continuously contribute to their transformation by acting the way they do. I argue that this paradox can be explained using the habitus theory : tradition (parádosi) is analyzed as a set of perception, judgement and action schemes activated during specific situations. Practice modifications are explained by the progressive modification of these schemes.