Le Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (LESC) est une unité mixte de recherche du CNRS et de l’université Paris Nanterre (UMR 7186).
Ce centre de recherche à vocation généraliste a été fondé par Éric de Dampierre en 1967. Son implantation principale est la MSH Mondes (bâtiment René-Ginouvès), tandis que ses deux centres spécialisés, le CREM (Centre de recherches en ethnomusicologie) et l’EREA (Enseignement et recherche en ethnologie amérindienne), ont rejoint en 2016 le bâtiment Max-Weber sur le campus.
Dès sa fondation, le laboratoire a associé recherche et formation. L’enseignement (licence et master) s’effectue dans le cadre du Département d’anthropologie de l’université Paris Nanterre. La formation à la recherche s’intègre à l’École doctorale « Espaces, temps, cultures » (ED395). L’intégration entre recherche et formation est assurée par l’implication des enseignants-chercheurs et des chercheurs dans les programmes d’enseignement, et par la participation des étudiants aux activités de recherche et de valorisation du laboratoire.
Le laboratoire dispose d’une importante bibliothèque de recherche, la Bibliothèque Éric-de- Dampierre, où sont déposés plusieurs fonds privés d’imprimés ainsi que des fonds d’archives scientifiques, principalement constitués de matériaux ethnographiques. Une politique active de numérisation et de valorisation de ces archives y est menée. La bibliothèque est, avec la bibliothèque du Laboratoire d’Anthropologie sociale, membre fondateur de deux réseaux documentaires, le Réseau ethnologie et le Réseau des archives des ethnologues au sein duquel s’organisent, ponctuellement, depuis 1999, colloques et journées d’études sur les matériaux de terrain. Les deux centres spécialisés CREM et EREA ont leurs propres fonds, certains anciens et importants comme les archives sonores en ethnomusicologie, objets d’une politique de communication numérique spécifique.
Le LESC possède en outre un service de publication qui assure l’édition électronique d’une revue d’anthropologie générale et comparative, Ateliers d’anthropologie, et participe occasionnellement à l’édition de monographies ou d’ouvrages collectifs.
Éric de Dampierre, alors sous-directeur à l’EPHE VIe section (qui deviendra plus tard l’EHESS), rejoignit la faculté des Lettres de Nanterre en 1965. À la rentrée de 1966, il y créa un enseignement d’ethnologie et fonda à la suite, en 1967, le Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative, dont la plupart des membres enseignaient à l’université. Ce laboratoire devint associé au CNRS en 1969. La première thèse de 3e cycle en ethnologie fut soutenue la même année par Manga Bekombo Priso.
Depuis, le lien avec le CNRS s’est consolidé. Devenu unité mixte de recherche CNRS-Université en 1989 (UMR 116, puis UMR 7535), le LESC a fusionné en 2006 avec le Centre Enseignement et recherche en ethnologie amérindienne (EREA), et en 2007 avec le Centre de recherche en ethnomusicologie du musée de l’Homme (CREM), pour devenir l’UMR 7186 qui intègre ces deux unités comme centres spécialisés du LESC.
Parmi les ethnologues qui ont enseigné ou effectué leurs études à Nanterre dans cette période héroïque, citons entre autres Alfred Adler, Cécile Barraud, Carmen Bernand, Hélène Clastres, Daniel de Coppet, Michel Dieu, Jeanne Favret, Michel Izard, Altan Gokalp, Remo Guidiéri, Alexander W. Macdonald, Aurore Monod Becquelin, Jacques Pimpaneau, Pribislav Pitoëff, Marshall Sahlins, Christiane Seydou, Pierre Smith, Dan Sperber, Andras Zempléni.
En 1997, le LESC quitte les locaux dévolus à l’enseignement d’ethnologie (bât. C 1er étage), où il était depuis l’origine, et s’installe à la Maison de l’archéologie et de l’ethnologie René- Ginouvès (MAE), devenue MSH Mondes en 2020. La fusion avec l’EREA puis le CREM en fait une unité multisite.
L’anthropologie, comme discipline, est en plein renouvellement, et le LESC participe de ce mouvement en s’appuyant sur des principes qui sont à la base de sa façon de faire : une vocation généraliste, et une pratique scientifique associant constamment enquête de terrain et spéculations théoriques.
Une vocation généraliste : par sa contribution à un inventaire raisonné des formes de société et de la diversité culturelle, le laboratoire participe à l’élaboration d’un savoir critique portant sur les facteurs d’unité du genre humain. L’unité de l’homme est ici conçue comme une aptitude générale de l’espèce humaine (mais non strictement propre à celle-ci) à s’organiser en société et à penser l’homme et la société, aptitude qui, seule, autorise l’exercice de la comparaison. Cette vocation généraliste est également portée par sa taille et la souplesse de son organisation, le nombre de chercheurs facilitant les recompositions thématiques et l’innovation.
Une pratique scientifique associant constamment enquête de terrain et spéculations théoriques : depuis sa fondation, le projet du laboratoire implique la recherche de terrain de longue durée, étayée par la connaissance de la langue, avec, si possible, des retours répétés sur les mêmes lieux d’investigation comme moyen privilégié de recueil de matériaux. Cette primauté accordée au terrain, à la production et à la conservation de données (devenue une politique prioritaire de la bibliothèque Éric-de-Dampierre) va de pair avec un accent (non exclusif) mis sur les terrains éloignés, non pour exclure ce qui serait de l’ordre du proche, mais parce que ce détour par l’autre favorise l’exercice de la comparaison.
La rigueur de la description ethnographique et le recours à des outils interprétatifs relevant de la sociologie comparative ou de l’anthropologie sociale expliquent l’importance accordée à l’analyse des formes de l’organisation sociale sur les cinq continents, aussi bien qu’à l’interprétation des systèmes de représentations. Si la méthode ethnographique se diversifie en intégrant les apports de la sociographie interactionniste, des outils quantitatifs, ou des protocoles expérimentaux inspirés des sciences cognitives, les institutions, quelles que soient leurs configurations, n’en demeurent pas moins au centre des préoccupations du laboratoire.
Le primat accordé à la maîtrise des langues vernaculaires, qu’elles soient ou non écrites, explique aussi le dialogue ancien et fécond avec la linguistique, par le truchement de l’ethnolinguistique et de nouvelles avancées en linguistique pragmatique, et avec les sciences cognitives. Ces champs sont particulièrement développés au sein du centre EREA ; l’approche cognitive est l’un des domaines d’interaction avec les ethnomusicologues du CREM.
L’histoire est depuis longtemps au cœur des préoccupations des chercheurs du laboratoire : l’exercice de la comparaison s’accomplit à partir de matériaux collectés à l’époque contemporaine, mais les inscrit dans des dynamiques historiques -entre autres celles des conditions de leur production. La comparaison diachronique permet de repérer transformations ou permanences structurelles, ainsi que les modalités de transmission ou de rupture qui organisent la perpétuation et les transformations des sociétés et des cultures.
Alors que s’intensifie le dialogue interdisciplinaire et que s’ouvrent de nouveaux champs aux lisières des savoirs établis, le LESC participe de ce mouvement en construisant des objets transdisciplinaires avec la géographie, les sciences politiques, la psychanalyse, ou les sciences du vivant, et ouvre de nouveaux champs à l’interface de l’histoire des sciences, de l’anthropologie de l’art et des techniques et de la muséographie, ou de la robotique.
C’est à un renouvellement dans la connaissance et dans l’espace intellectuel de l’anthropologie que le LESC aspire, avec l’ambition de contribuer fortement aux interrogations et aux recherches actuelles dans l’épistémologie de la discipline.