Publication
Du bidonville à l'hôpital. Nouveaux enjeux de la maternité au Rajasthan
Présentation
Préface de Roger Jeffery
Depuis les années 2000, le secteur de la santé de la reproduction semble constituer un sujet d’inquiétude, notamment dans le nord du pays. Les taux de mortalité encore élevés discréditent l’image de superpuissance que l’État indien aime afficher, le déséquilibre du sex-ratio continue de se creuser et, malgré une importante baisse du taux de fécondité, le pays doit faire face à une population de plus d’un milliard trois cent millions d’habitants.
À partir d’un terrain ethnographique d’un an et demi dans un hôpital public et dans les bidonvilles de Jaipur, Clémence Jullien analyse les conséquences, pour les femmes et leur famille, des nouveaux programmes de santé : une prime financière incite les femmes à accoucher à l’hôpital plutôt qu’avec des accoucheuses traditionnelles et, depuis 2011, les soins obstétriques à l’hôpital sont devenus entièrement gratuits. Toutefois, ces programmes, censés garantir l’accès aux soins, rendent les bénéficiaires les plus vulnérables davantage conscients des inégalités socio-économiques qu’ils subissent, renforcent les stéréotypes existants et donnent au personnel hospitalier et aux membres d’ONG un pouvoir discrétionnaire. Tensions sociales (castes, classes) et religieuses se cristallisent autour de la maternité. D’autres enjeux cruciaux - discriminations à l’égard des petites filles, faible pouvoir décisionnel des femmes, recours limité à la contraception - surgissent alors, accentuant les différences au sein de la société indienne, sous couvert de progrès et au nom de l’intérêt de la nation.
Clémence Jullien est docteure en ethnologie, spécialiste de l’Inde, des politiques de santé et des rapports de genre. Depuis août 2017, elle développe une nouvelle recherche sur les conséquences matrimoniales liées au déficit de femmes au Pendjab, avec le soutien de l’université de Zurich et du Fonds national suisse.