[English version below]
Après avoir exercé des responsabilités collectives de 2005 à 2010, en tant que directeur du LESC et membre élu de la section 38 du Comité national, et s’être employée à promouvoir une vision renouvelée de l’anthropologie, Anne-Marie Peatrik a continué d'encadrer ses doctorants et a renoué avec ses activités personnelles de chercheur.
L’anthropologie des âges et des générations, thème qui puise dans son ethnographie des Meru du Kenya et qui s’est déjà traduit par diverses publications et des enseignements dispensés à l’université Paris Ouest et à l’université de Chicago, est travaillé pour le moment selon trois dimensions : la co-construction des genres au fil des âges ; les déclinaisons de la catégorie jeune ; les théories savantes et populaires des âges de la vie.
La nouvelle institution de la culture, au Kenya et en Afrique de l’Est, émanation des changements en profondeur des sociétés, est appréhendée selon des angles variés : la patrimonialisation de la coutume, les politiques linguistiques, l'anthropologie des savoirs ethnographiques.
De par son parcours pluridisciplinaire, de la géographie à l’ethnologie et à l’anthropologie en passant par l’histoire, elle s’intéresse à la construction d’objets interdisciplinaires et aux modalités concrètes de convergence et de divergence entre champs de recherche. Des projets de collaboration avec des ethno-archéologues ont ainsi été développés, comme la diffusion des innovations chez les potières.
À ses activités d’encadrement des étudiants à différents niveaux, elle ajoute enfin une activité éditoriale ; elle est membre du comité de rédaction de Ateliers d’anthropologie, série en ligne intégrale dont elle a piloté la transformation en revue à comité de lecture quand elle en a été rédacteur en chef.
After discharging collective duties from 2005 to 2010 as Director of the LESC and an elected member of Section 38 of the National Committee, and after working on promoting a renewed vision of anthropology, Anne-Marie Peatrik kept on supervising her Phd students and returned to her individual activities as a researcher.
The anthropology of age and generation – a theme that draws on her ethnography of the Meru of Kenya and has already resulted in various publications and courses at the University of Paris West and the University of Chicago – is currently proceeding according to three dimensions: the simultaneous construction of genres throughout the ages; the deviations of the “young” category; scholarly and popular theories of the stages of life; political anthropology of ages.
The new institution of culture in Kenya and in East Africa – a product of deep changes in society – is understood from a variety of angles: the changing status of anthropology, the patrimonialisation of custom, linguistic policies, the anthropolgy of ethnographic knowledges.
Throughout her multidisciplinary career, involving geography, ethnology, anthropology and history, she has been interested in the construction of interdisciplinary objects and the concrete methods of convergence and divergence between fields of research. This has led to the development of collaborative projects with ethno-archaeologists, namely the diffusion of innovation among the potters.
To her student supervision activities, she finally adds an editorial activity; she is a member of the editorial board of Ateliers d’anthropologie, an online journal. During her time as Editor-in-Chief, she spearheaded its transformation into a peer-review journal.
Comité Scientifique Anr Salmea (2019-2022) Self-Accomplishment and Local Moralities in East Africa, org. Yvan Droz, Valérie Golaz, Henri Médard
Comité Scientifique Music and Dance Research in East Africa Conference 12 et 13 octobre 2016, Institut de Recherche en Afrique (IFRA Nairobi) & The Technical University of Kenya (Nairobi) org. Kahithe Kiiru
Comité Scientifique East-African Athletics & Social Sciences Colloque international 29-30 juin, 1er juillet 2015, Dept of Sport Sciences, Addis Ababa University, Ethiopia org. Benoist Gaudin
Membre du comité de rédaction d'Ateliers d'anthropologie et des Cahiers d'Afrique de l'Est
Évaluations d'articles de revue : Cahiers d’études africaines, Cahiers d’ethnomusicologie, Gérontologie et société, Journal des Africanistes, Terrain
Evaluation de structures :
Membre du comité HCERES pour l'Institut des Mondes Africains IMAF, UMR 8171 (CNRS) & 243 (IRD), Paris nov-dec 2017
Évaluations de candidatures :
conférences et cours en L3, M1, M2 (département d'anthopologie Université Paris Nanterre; EHESS)
encadrement de Masters et de thèses
Membre de l’ANR Diffceram 2013-2016 Dynamiques de diffusion des techniques et styles céramiques : données comparatives actualistes et modélisation multi-agents (V.Roux, Lesc & National Museum, Kenya)
Membre de l’ANR Evepjvae 2009-2012 Enfants victimes, enfants précaires et jeunesse « violente » en Afrique de l’Est (Burundi, Kenya, Ouganda, Rwanda) : réalités, perceptions et prises en charge. (C. Thibon, Ifra Nairobi ; V. Golaz, Ird Kampala)
Comment penser les jeunes et la jeunesse en Afrique ? Comment ne pas réduire à la condition tragique faite à certains la grande diversité des existences que connaissent les autres ? Quels moyens se donner pour un essor durable des connaissances, au delà des conventions intellectuelles et des clichés sensationnalistes ? Que faire d’une catégorie fondée sur l'âge, ce critère improbable qui à la fois procède du devenir biologique des humains, sert d'unité de mesure des individus dans les recensements de population, est mobilisé à des fins fort diverses par les politiques et les publicistes, et dont les acteurs eux-mêmes se jouent dans leurs interactions ? Au travers d’études de cas, écrites bien souvent par des auteur(e)s qui sont eux-mêmes des jeunes, cette livraison propose une nouvelle anthropologie comparative des jeunes et de la jeunesse. Elle déconstruit l’historicité de la catégorie jeune et son arrivée tardive dans le champ des études africaines, rappelle que des modalités coutumières imprègnent encore les devenirs. Des jalons sont repérés dans le foisonnement des travaux, et des questionnements formulés pour de nouvelles enquêtes. Ainsi sont posés, entre le local et le global, les cadres d’une comparaison avec d’autres jeunesses de par le monde, et le moyen d’enrichir des analyses trop marquées du seul sceau de la mondialisation.
Dans le contexte désormais très transformé où vivent les Meru Tigania-Igembe, agro-éleveurs établis au nord-est du mont Kenya, dotés autrefois d’un système politique de classes de générations, l’article examine la différenciation des jeunesses et les modalités des limites d’âges. À l’encontre des idées reçues, le passage à l’échelon suivant n’était ni automatique ni dénué de fortes tensions, et la jeunesse était bien autre chose que cette phase intermédiaire entre l’enfance et l’âge adulte, ce dont la société et la culture concernées témoignent au travers de récits, de règles et d’un vocabulaire particulier visant à en traiter. De nos jours, sous l’effet de la scolarisation généralisée, de nouvelles catégorisations de la jeunesse sont apparues, se surimposant ou se substituant à d’anciennes. Toujours prégnante, la question clé des initiations s’est déplacée, opérant une désynchronisation majeure des parcours des filles et des garçons. L’article entend contribuer à une anthropologie de la jeunesse envisagée ici du point de vue de ses limites, et vise à remettre à sa juste place le rite de passage dans des processus qui relèvent tout autant des trajectoires complexes et des nœuds cruciaux de l’existence.
Deconstructing the "young people" category in Africa, in order to place its study on new foundations: such is the aim of this anthropological essay. Understood through its emergence and its historical establishment, particularly during the sequences of events that followed decolonisation, the "young person" category is separated out from the tangle of connected concepts (cadet social, junior, young generation), enriched with components of its construction that have gone unnoticed (calendar age, demographic and political category), explored taking account of the uncertainty surrounding the delimitations and characterisations of that phase of human development. Thus comparatively re-characterised, the means of another interpretation of the "young people" category appeared, making it possible at once to conceive of the heterogeneity of this category, to apprehend its underlying dynamics, and to sketch angles of approach for new studies.
Déconstruire la catégorie « jeune(s) » en Afrique pour en refonder l’étude, tel est l’objectif de cet essai d’anthropologie. Saisie au travers de son émergence et de son affirmation historique, en particulier lors des séquences qui ont suivi les décolonisations, la catégorie jeune est tour à tour démêlée de l’écheveau des notions et concepts voisins (cadet social, junior, jeune génération), enrichie des composantes passées inaperçues de sa construction (âge calendaire, catégorie démographique et politique), interrogée dans l’incertitude des délimitations et des caractérisations de cette phase du développement humain. Ainsi requalifiée comparativement, les moyens d’une autre lecture de la catégorie jeune sont apparus qui permettent à la fois de penser l’hétérogénéité de la catégorie, d’en appréhender les dynamiques sous-jacentes et d’esquisser des angles d’approche pour de nouvelles enquêtes.
In the much-changed context of the present-day lives of the Tigania-Igembe Meru (agro-herders living north-east of Mount Kenya who once had a political generation-set system), the article examines the differentiation of categories of youth and the modalities of age limits. Contrary to common perceptions, the transition to the next grade was neither automatic nor devoid of strong tensions, and youth was something other than that intermediate phase between childhood and adulthood, as the society and culture under consideration testifies to, through narratives, rules and a special vocabulary for the purpose. Nowadays, under the effect of widespread schooling, new youth classifications have appeared, overlapping or replacing old ones. The still-significant key question of initiations has shifted, causing a major de-synchronisation between the paths of girls and boys. The article offers a contribution to an anthropology of youth, viewed here from the perspective of its limits, and aims to put the rite of passage back in its rightful place within processes that concern both complex trajectories and the crucial junctions of existence.
Les publications sur la jeunesse se multiplient, le numéro 42 d’Ateliers d’anthropologie témoigne à sa façon de l’engouement pour la thématique. Dans le cadre de cette livraison sur les « jeunes » dans le monde méditerranéen, pour prolonger les analyses et amorcer un questionnement comparatif, il a paru intéressant de confronter trois ouvrages traitant peu ou prou du même sujet, et de réfléchir à ce qui les lie ou les sépare, plus particulièrement du point de vue des modalités d’approche de c...
Jeunes, jeunesse, jeune génération sont des désignations qui relèvent à la fois du vocabulaire descriptif courant et du discours politique et médiatique. Dans ce cadre, l’irruption des jeunes dans l’espace public est souvent appréhendée à travers des clichés contradictoires : violence, délinquance, contestation, chômage, attente, piétinement versus vitalité, énergie, création, renouvellement, espoir, futur… Ces termes recouvrent aussi des catégories ou des objets d’analyse des sciences social...
L’article est une contribution à l’histoire de l’ethnologie et à l’anthropologie des savoirs par le truchement de la biographie de la première monographie d’ethnologie réalisée at home par un sujet colonial, Jomo Kenyatta qui devint en 1964 le premier président du Kenya indépendant. Après avoir rappelé l’origine de ce texte – un master d’anthropologie soutenu à la London School of Economics sous la direction de Bronislaw Malinowki et publié en 1938 – on abordera la question de sa réception paradoxale, au travers des éditions successives dont l’ouvrage a fait l’objet. Tantôt considéré comme la vision fonctionnaliste d’une société idéalisée, tantôt décrié ou célébré comme manifeste anticolonial, tantôt encore brocardé comme texte de la division nationale, ce texte a rarement été lu pour ce qu’il est d’abord, une source ethnographique pour la connaissance des Kikuyu et des peuples d’Afrique de l’Est.
Attestée dans nombre d’anciennes sociétés est-africaines organisées en classes d’âge et de génération, encore vivace dans les populations des espaces périphériques, l’obligation de tuer un ennemi pour devenir capable de se reproduire est analysée de deux manières : à l’aune de l’écologie politique intrinsèque aux systèmes de classe d’âge et de génération ; en termes d’injonction ontogénétique et de distinction des sexes au fil des âges. Affrontant la possibilité de sa propre mort en cherchant à capter la vie de l’ennemi, le guerrier augmente sa capacité génésique et celle de sa classe. L’efficacité de ce transfert d’énergie reproductive puise dans le modèle de l’accouchement où la femme produit de la vie en affrontant la possibilité de sa propre mort. Au-delà de leurs particularités, ces sociétés éclairent, sous un jour inédit, le lien entre guerre et virilité et rappellent l’enjeu fondamental que sont les âges de la vie dans la construction des masculinités et de la distinction des sexes.
Attestée dans nombre d’anciennes sociétés est-africaines organisées en classes d’âge et de génération, encore vivace dans les populations des espaces périphériques, l’obligation de tuer un ennemi pour devenir capable de se reproduire est analysée de deux manières : à l’aune de l’écologie politique intrinsèque aux systèmes de classe d’âge et de génération ; en termes d’injonction ontogénétique et de distinction des sexes au fil des âges. Affrontant la possibilité de sa propre mort en cherchant à capter la vie de l’ennemi, le guerrier augmente sa capacité génésique et celle de sa classe. L’efficacité de ce transfert d’énergie reproductive puise dans le modèle de l’accouchement où la femme produit de la vie en affrontant la possibilité de sa propre mort. Au-delà de leurs particularités, ces sociétés éclairent, sous un jour inédit, le lien entre guerre et virilité et rappellent l’enjeu fondamental que sont les âges de la vie dans la construction des masculinités et de la distinction des sexes.
L’article questionne le hiatus grandissant, au Kenya, entre la patrimonialisation des cultures et la connaissance méthodique des sociétés anté-coloniales