Initialement portée sur l'étude des migrations de travail féminines dans l'Unité Territoriale Autonome de Gagaouzie (République de Moldavie) et leurs conséquences au niveau local, la thèse de Ludivine Ricou s'est réorientée lors de la survenue de la pandémie de Covid-19 au cours de son terrain (changement du titre en cours).
Demeurant sur place lors des moments les plus critiques de la pandémie (de janvier à fin août 2020) et bénéficiant d'une connaissance de long terme de la région (plusieurs longs séjours depuis 2012 et plusieurs retours sur le terrain depuis 2020), son travail interroge le rapport des habitants d'une petite ville de l'UTA sur les "crises" en série (dissolution de l'URSS et libéralisation "choc" de l'économie, scandales de corruptions et accroissement des inégalités etc.) affectant leur quotidien depuis les années 1990.
Son approche théorique se situe dans le prolongement d'une anthropologie de la morale (Foucault, Mahmood, Laidlaw, Fassin, Lambek) et étend contribuer à l'étude des moments de ruptures ou de conflits épistémiques (Van Gennep, Thompson, Robbins, Zigon, Turnbull, Heintz, Howland, Corinna, et al.).
Ses enquêtes de terrain mettent notamment en évidence l'omniprésence d'une méfiance dont les manifestations pendant la pandémie de Covid (rejet du qualificatif d'épidémie, soupçons de complots, refus de la vaccination) révèlent la présence d'un malaise diffus au sein de la population de l'UTA, retraités et jeunes adultes compris.
Dans la lignée, entre-autres, du travail de Diego Gambetta, Radu Umbreș, Florian Mühlfried, Matthew Carey, Olivier Allard et Rachel Renault, la thèse de Ludivine Ricou rend ainsi compte des différentes manifestations et significations de la "méfiance" rencontrée au cours de ses terrain. Ce travail d'explicitation permet, en outre, de recréer un dialogue et du débat lorsque les frustrations, la colère ou les peurs des habitants de l'UTA ne trouvent souvent pour seule tribune que les rumeurs et l'idéologie conservatrice et anti-occidentale du "russkyi mir" (popularisée par la Russie de Poutine depuis 2007).
Moldavie
Moldavie
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2020-2021
CM "Anthropologie de l'Europe", 24h, Licence 3, Département d'Anthropologie, Université Paris Nanterre
TD "Histoire de l'Anthropologie", 24h, Licence 1, Département d'Anthropologie, Université Paris Nanterre
Depuis l’indépendance de l’Ukraine en août 1991, et plus particulièrement depuis la Révolution orange en 2004, la Russie perçoit tout signe de rapprochement entre l’Ukraine et l'Occident comme une menace pour ses intérêts stratégiques et sa sécurité. Bien avant de provoquer le conflit de haute intensité consécutif à son invasion à grande échelle de l'Ukraine, la Russie de Vladimir Poutine a mis en place une large gamme de stratégies reposant sur de multiples leviers d’influence et d’action. Ces stratégies, relevant initialement de la diplomatie publique et du soft power, se sont progressivement transformées en véritables outils offensifs (désinformation) et Moscou a cherché à combiner ces stratégies non-militaires avec des moyens militaires plus ou moins directs (notamment par le biais d'acteurs "adhocratiques"). L’objectif de cette journée est double. Premièrement, elle sera l’occasion de revenir sur les différents leviers d’influence et d’action de la Russie en Ukraine avant l'invasion de l'Ukraine pour en proposer un panorama et tenter de les mettre en perspective. Dans une volonté comparatiste, la journée permettra aussi de s'intéresser à ces mêmes leviers dans des espaces différents vers lesquels la Russie s’est employée à projeter sa puissance, aussi bien aux marges de l’ex-URSS que vers des territoires plus éloignés, notamment au Moyen-Orient et en Asie.