Pour les Zunûj d’Arabie orientale, le rite de possession ramsat-al-leiwah est une pratique à caractère thérapeutique. Il est supposé guérir les individus des maladies et des tourments infligés par des esprits nommés as-sawâḥili. Ainsi, il n’est pas rare, au cours de ses réalisations, que des actes agressifs soient perpétrés entre esprits de possession, entre participants humains, voire entre esprits et êtres humains. Dans ces situations, les Zunûj utilisent l’expression arabe rabsha pour qualifier ces actes répréhensibles. Ce terme renvoie simultanément à deux significations : la nuisance et le chaos. Or, de leur point de vue, il est essentiel que tous – humains et esprits – observent entre eux une attitude respectueuse et sans hostilité. Cela s’accorde avec le caractère festif recherché pour le bon déroulement du rite, d’autant plus que, pour être considéré comme réussi, il doit s’achever dans la bonne entente et l’harmonie entre tous les participants humains et les esprits. C’est à partir d’un exemple extrait d’une réalisation de ce rite datant de 2009 au Sultanat d’Oman que cet article propose d’explorer les expressions de l’agressivité en contexte rituel en se fondant sur une micro-analyse de l’engagement des différents acteurs et de leurs interactions.
Traditional Music Patrimonialization in the United Arab Emirates: State of Play and Stakes of a Cultural Policy in Mutation (1971-2010)
À travers l’étude comparative des composants cérémoniels du rituel de possession leiwah au Sultanat d’Oman (Arabie orientale) et ceux des cérémonies de possession des cultes bara et kipemba en Tanzanie et Kenya (Afrique de l’Est), cet article se propose de dégager la parenté entre le leiwah d’Arabie et ces deux cultes est-africains. Tout d’abord, il distingue de quelles façons le leiwah est associé à l’esclavage des Noirs d’origine est-africaine en Arabie orientale, qu’il présente des différences avec le culte zâr, précédemment connu en Arabie, et que son panthéon d’esprits sawahili renvoie à des esprits swahilis en Afrique de l’Est. Puis, à travers l’exposition et la comparaison des panthéons d’esprits et des composantes cérémonielles relevées dans les cérémonies leiwah, bara et kipemba, il est indiqué de quelles façons la parenté entre ces cultes de possession peut être considérée comme pertinente, dans la mesure où les traits communs se recoupent de manière significative. Ces éléments permettent, finalement, de considérer comme plausible l’hypothèse d’une transmission – peut-être fragmentaire aujourd’hui – d’une culture swahilie en Arabie orientale.
À travers l’étude diachronique de la politique culturelle relative au patrimoine immatériel aux Émirats Arabes Unis depuis sa fondation en 1971, cet article analyse l’origine et l’évolution du processus de patrimonialisation des musiques traditionnelles et la manière dont elles ont été instrumentalisées par l’État afin de construire l’identité de la nation. Il distingue comment les termes de la convention de 2003 pour la sauvegarde des PCI de l’UNESCO qui, induits des mécanismes d’institutionnalisation du patrimoine, entérinent une patrimonialisation de fait aux Émirats et légitiment une politique culturelle axée sur la marchandisation de la culture. Dans ce contexte, la crise identitaire actuelle et la déliquescence rapide des pratiques musicales locales représentent les éléments visibles d’une mutation structurelle de grande ampleur de la gestion de la culture. Elles indiquent qu’à terme le phénomène observé aujourd’hui aux Émirats, avec le projet de la nouvelle Autorité pour la Culture et le Patrimoine d’Abû Dhabi (ADACH) de créer un centre pour les musiques dans le monde de l’islam à Al Aïn, est tourné vers une stratégie de captation et de monopolisation économique du patrimoine immatériel à l’échelle du Golfe arabo-persique.
Le leiwah est une tradition musicale afro-arabe, qui s’est diffusée dans le golfe Persique à partir de l’Afrique de l’Est par l’intermédiaire des marchands omanais. À Dubai, le leiwah est interprété principalement lors des mariages des différentes communautés de la ville (Bédouins, Baloutches, ‘Ajam), ainsi que lors des commémorations, les fêtes nationales et les festivités commerciales. Il est pratiqué par les membres de ces communautés, de manière semi-professionnelle, plus particulièrement par certains Baloutches, au sein de structures associatives, les Associations d’Arts populaires. Anciennement non rémunérée, cette pratique est aujourd’hui au centre d’une activité économique hautement concurrentielle entre les ensembles musicaux et les associations qui les abritent. Ce phénomène récent dans le contexte urbain, culturel et social de Dubaï permet d'éclairer le statut des musiciens dans la société et dans l'économie émiratie, en pleine mutation par rapport au modèle traditionnel qui était encore en vigueur il y a quarante ans.
La région du Golfe arabo-persique (illustrée ici par les Émirats arabes unis) constitue un observatoire d’étude récent en matière de politiques culturelles et de l’emprise grandissante de l’économie de marché sur le patrimoine immatériel. Cette région présente en effet une grande diversité de pratiques musicales traditionnelles communautaires (bédouin, baloutche, zandj… etc.), qui sont encore pratiquées dans la sphère sociale tout en constituant un capital symbolique incontournable dans le développement économique. Depuis 1971 – date de la création de la fédération des Émirats Arabes Unis –, les traditions musicales connaissent à des degrés divers des transformations dans leur cadre de performance comme dans leur modalité d’exécution. Un phénomène qui résulte en partie d’un mécanisme de patrimonialisation visant à promouvoir une unité culturelle nationale. Aujourd’hui, suite à la ratification de la convention de l’UNESCO pour les PCI par les E.A.U. et à l’émergence d’un marché culturel local aux spécificités urbaines, le secteur entrepreneurial capte et transforme à son tour ces musiques patrimonialisées au moyen de processus de production et de diffusion inhérents à la sphère économique L’objet de cette intervention est de présenter les grandes phases de la politique culturelle des E.A.U. et sa mutation actuelle en mettant en évidence la logique qui sous-tend les transformations relevées dans les traditions musicales locales.
Conception et réalisation de la première version du site du CREM. Élaboration de la charte graphique et création du logotype du CREM.
Court métrage documentaire
Le laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (Lesc–UMR 7186, CNRS/Université Paris Nanterre), propose un dispositif de soutien aux candidat.es au concours 2025 au poste de chargé.es de recherche au CNRS se reconnaissant dans les perspectives scientifiques du laboratoire et souhaitant leur rattachement au Lesc en cas de recrutement. Plus d'informations ici