Pia Bailleul est actuellement postdoctorante au Centre des études himalayennes, où elle travaille sur le développement de l’exploitation des terres rares au Groenland dans le cadre de l’ANR « Ruling on nature : animals and the environment before the Court ».
Cette recherche s’inscrit dans la continuité de sa thèse de doctorat intitulée « Gisements nationaux et terres communes : étude des reconfigurations juridiques, géologiques et politiques du traitement des sols et des sous-sols groenlandais à partir de l’ethnographie du projet minier de Kuannersuit », réalisée entre 2017 et 2022. Ce travail porte sur les régimes de traitement, d’occupation et d’exploitation des terres au Groenland et les influences de l’industrie minière dans leurs évolutions. Pour cette étude, Pia Bailleul s’est particulièrement intéressée aux troubles politiques et sociaux engendrés par un projet d’exploitation de zinc, de terres rares et d’uranium pour le site de Kuannersuit, montagne située dans le sud du Groenland (région Kujalleq), porté depuis 2007 par la compagnie australienne Greenland Minerals. Elle a souligné la place centrale occupée par ce projet dans l’ambition d’accession à une indépendance économique vis-à-vis du Danemark, ancien État colonisateur, mais également dans le développement de l’industrie minière de grande échelle. Ce projet a accompagné une réforme générale des droits fonciers et des activités extractives sur le territoire, transformation des pratiques minières vieilles de plusieurs siècles. Ce phénomène est imbriqué à la période politique que traverse le Groenland, l’étatisation et la propriétisation des terres et des ressources.
Pia Bailleul s’est de plus intéressée aux effets du projet sur le territoire ciblé, la ville de Narsaq et le village de Qassiarsuk (région Kujalleq). Elle a mis en lumière une concurrence économique et spatiale pour Kuannersuit, ainsi qu’un mouvement diffus de révision des pratiques territoriales. Contenues dans le concept inuit nuna, qui signifie territoire, terre et pays, ces pratiques relèvent de la manière d’habiter, d’exploiter et de transmettre le territoire entre les générations et les occupants. Par ses caractéristiques productivistes et politiques, le projet minier rompt ces liens et fonde une nouvelle norme d’exploitation.
Depuis 2016, Pia Bailleul effectue des terrains de recherche à Nuuk, la capitale, et dans plusieurs villes et villages sud-groenlandais tels que Narsaq, Qaqortoq, Qassiarsuk et Nanortalik. Elle parle le kalaallisut, langue nationale du pays.
Pia Bailleul is currently a postdoctoral fellow at the Center for Himalayan Studies, where she studies the development of rare earth exploitation in Greenland within the framework of the ANR "Ruling on nature: animals and the environment before the Court".
This research is a continuation of her doctoral dissertation entitled "National deposits and common lands: a study of the legal, geological and political reconfigurations of the treatment of Greenlandic soils and subsoils based on the ethnography of the Kuannersuit mining project", conducted between 2017 and 2022. This work focuses on land’s processing, occupation and exploitation regimes in Greenland and the influences of the mining industry in their evolution. For this study, Pia Bailleul focused on the political and social issues generated by a zinc, rare earths and uranium mining project for the Kuannersuit site, a mountain located in southern Greenland (Kujalleq region), carried out since 2007 by the Australian company Greenland Minerals. She emphasized the central role played by this project in the ambition of achieving economic independence from Denmark, the former colonial state, but also in the development of the large-scale mining industry. The project accompanied a general reform of land rights and mining activities in the territory, transforming centuries-old mining practices. This phenomenon is intertwined with the political period that Greenland is going through, the stateization and ownership of land and resources.
Pia Bailleul also looked at the effects of the project on the target area, the town of Narsaq and the village of Qassiarsuk (Kujalleq region). She highlighted an economic and spatial competition for Kuannersuit, as well as a diffuse movement of revision of territorial practices. These practices are contained in the inuit concept of nuna, which means territory, land and country, and relate to the way in which the territory is inhabited, exploited and transmitted between generations and occupants. Through its productivist and political characteristics, the mining project breaks these links and founds a new norm of exploitation.
Since 2016, Pia Bailleul has been conducting fieldwork in Nuuk, the capital, and in several South Greenlandic towns and villages such as Narsaq, Qaqortoq, Qassiarsuk and Nanortalik. She speaks Kalaallisut, the national language of the country.
2019-2020, semestre 2
2018-2019, semestre 2, TD Nature et culture, L1 (24h)
En 2009, l'autonomie politique du Groenland est renforcée par une législation indépendantiste. Cette loi établit le transfert de toutes les compétences politiques à l'île, et notamment celles sur les sols, jusque-là sous autorité danoise. Elle fixe les conditions de l'autonomisation du budget, toujours partiellement financé par le Danemark. Sa part serait remplacée par les recettes de l'industrie minière, apportant au Groenland l'indépendance. Depuis 2009, ce secteur est ainsi l'objet de lois qui visent à le renforcer et à nationaliser les terres. Ces développements donnent lieu à une contestation nationale, qui fait émerger des revendications « autochtones » et « citoyennes » de façon inédite. Ces catégories politiques deviennent alors les symptômes d'une cohésion nationale troublée par ces nouvelles mesures. Cet article étudie les caractéristiques et implications de l'association entre industrie minière et indépendance, et analyse le trouble politique comme révélateur d'une reconfiguration des modalités d'usages et de gestion des terres.
Langue officielle du Groenland, le kalaallisut cohabite avec des dialectes territoriaux et le danois. Cette pluralité linguistique trouve ses origines dans l'occupation morcelée de l'île, favorisant le développement des régionalismes, et l'occupation danoise, propageant cette langue dans les secteurs scolaire et administratif. Malgré l'institutionnalisation du kalaallisut en 2009, le danois reste encore majoritairement utilisé dans le secteur professionnel, entraînant une situation de concurrence et de plafond de verre. À l'échelle nationale, ceci met en exergue des phénomènes d'exclusion linguistique se faisant indices et vecteurs d'inégalités sociales. À partir de données ethnographiques relatives à l'usage des langues, ce papier questionne le rôle structurel des institutions dans la socialisation linguistique et la valeur symbolique associée à chaque langue, facteurs déterminants dans l'usage pragmatique. L'étude de discours réflexifs engage la notion d'usage politique comme pratique divergente, intergénérationnelle et conscientisée de la langue.
En danois, «Groenland» signifie «terre verte». Un nom étonnant pour la plus grande île du monde, quatre fois grande comme la France, recouverte à 80% par une calotte glaciaire. Cette immense terre de glace isolée fascine. Et de plus en plus de touristes se lancent à sa conquête. Victor, un Français, a embarqué à bord d'un brise-glace de 73 mètres de long pour découvrir cette nature vierge d'une beauté à couper le souffle mais qui n'est pas sans risque. Entre températures polaires, icebergs et ours blancs, le Groenland reste une terre brute et hostile. Les 56 000 Groenlandais ont appris à vivre dans ces conditions extrêmes