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Anthropologie des espaces habités : politiques des lieux et poétiques spatiales
Les travaux de Sarah Carton de Grammont portent sur les liens entre politique et espaces habités dans le contemporain. Il s’agit aussi bien de prendre les espaces comme entrée dans le politique pour comprendre comment ils sont mobilisés dans des rapports de pouvoir, que de comprendre comment on fabrique des lieux de/du pouvoir ou des territoires/entités politiques. S’intéresser aux espaces habités, c’est s’intéresser aux espaces dans leurs échelles tels qu’ils sont pratiqués, incarnés, vécus, rêvés. C’est poser qu’il y a des liens entre rapport aux espaces et subjectivation politique. Ses recherches prolongent donc le questionnement classique sur la manière dont les sociétés humaines projettent du symbolique sur l’espace pour l’organiser et s’appuient sur l’espace pour s’organiser symboliquement – avec un intérêt marqué pour les processus. La ville – scène, cadre et matière de l’habiter politique – offre ainsi des terrains de prédilection. Dans un premier temps, après une thèse ayant porté sur la poétique politique d’un quartier classé et autogéré de la Moscou contemporaine, il s’agit de mener une anthropologie pragmatique d’un espace politique problématique : la Belgique actuelle, appréhendée par la fabrique et la dispute des espaces qui la composent ; et par la fabrique et la dispute de sa royauté.
Anthropology of Inhabited Spaces: Politics of Place and Spatial Poetics
Sarah Carton de Grammont's work focuses on the links between politics and ihabited spaces in the contemporary era. It also considers spaces as points of entry into politics to understand how they are mobilised in relationships of power, and how we create places of power or political territories/entities. To study inhabited spaces is also to study spaces in the scales as they are practiced, embodied, lived, and dreamed. It is to ask if there are connections between the relationship to space and political subjectivition. Her research expands upon the classic questioning of the manner in which human societies project the symbolic onto space to organise it, and rely on space to organise themselves symbolically - with a marked interest in processes. The city - stage, setting, and material of political inhabitation - is thus her preferred field. After a thesis focusing on the poetic politics of a classed and auto-managed neighbourhood of contemporary Moscow, she proposes a pragmatic anthropology of a problematic political space: Present Belgium apprehended by the creation and disputes of the spaces that cmpose it; and by the creation and dispute of its royalty.
Organisation de séminaires:
Chargée de cours à l'Ecole Polytechnique (2018, 24h) :
ATER en anthropologie sociale et ethnologie à l’EHESS (Paris, 2014-2015, 96h) :
ATER en anthropologie sociale et ethnologie à l’EHESS (Paris, 2013-2014, 96h) :
Chargée de cours à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris Quai Malaquais (2011-2012) :
Comités de suivi de thèse :
Tutorat M1-M2 :
Sept anthropologues se réunissent pour parler ensemble de la notion de nostalgie. Chacune d’entre elles, à sa manière, se retrouve confrontée à ce sentiment profondément ambivalent à mesure qu’elle pressent ou assiste à la disparition de son « terrain », ce territoire d’étude au long cours propre à chaque anthropologue. Mais d’où cette nostalgie peut-elle bien venir ? Est-elle légitime ? Et si, parfois, les anthropologues avaient de bonnes raisons d’être nostalgiques ? Tels les canaris au fond de la mine, sentiraient-elles « venir le grisou » ? Pour tenter de répondre à ces questions, elles ont choisi de faire un pas de côté par rapport à leur pratique habituelle : en optant pour la fiction, en renouant avec l’écriture créative, en faisant appel à leurs souvenirs, leurs lectures, et en mettant à l’épreuve leur subjectivité.
La recherche urbaine s’est longtemps focalisée sur les très grandes villes mais aujourd'hui, plus de la moitié de la population urbaine mondiale vit dans des agglomérations de moins d’un demi-million d’habitants. Le projet de ce numéro de Monde commun est né du constat de ce que ces espaces non sensationnels sont le plus souvent décrits comme problématiques : urbanité lacunaire, léthargie économique et anomie culturelle se conjugueraient pour attiser les conservatismes politiques. Sans démentir ce constat, les auteurs montrent que ces espaces périphériques sont également le lieu de formes de politisation à bas bruit, ici documentées à l’échelle micro-locale. Les citadins des villes subalternes sont-ils aussi mauvais citoyens qu’on le dit ? De Tours à Riace, de Mayotte à Saint-Étienne, ce dossier de Monde Commun apporte une contribution significative à la compréhension des formes contemporaines de prise de parole en contextes disqualifiés.
La recherche urbaine s’est longtemps focalisée sur les très grandes villes mais aujourd'hui, plus de la moitié de la population urbaine mondiale vit dans des agglomérations de moins d’un demi-million d’habitants. Le projet de ce numéro de Monde commun est né du constat de ce que ces espaces non sensationnels sont le plus souvent décrits comme problématiques : urbanité lacunaire, léthargie économique et anomie culturelle se conjugueraient pour attiser les conservatismes politiques. Sans démentir ce constat, les auteurs montrent que ces espaces périphériques sont également le lieu de formes de politisation à bas bruit, ici documentées à l’échelle micro-locale. Les citadins des villes subalternes sont-ils aussi mauvais citoyens qu’on le dit ? De Tours à Riace, de Mayotte à Saint-Étienne, ce dossier de Monde Commun apporte une contribution significative à la compréhension des formes contemporaines de prise de parole en contextes disqualifiés.
En décembre 1972, avec le lancement de la sonde Apollo 17, la Nasa mettait un terme à son programme d’exploration de la Lune. Lorsque cette même année et la suivante, elle envoya Voyager 1 puis Voyager 2 à destination de Jupiter, Uranus, Saturne et Neptune, l’astrophysicien Carl Sagan demanda de fixer sur les sondes une plaque aux dimensions réduites et très légère, qui a atteint la postérité sous le nom de Golden Record. Pour ce « message à destination de possibles civilisations extra-terrestres », Sagan et son équipe choisirent cent dix-huit photographies « de notre planète, de nous-mêmes et de notre civilisation », qu’accompagnaient encore « 90 minutes de la meilleure musique au monde, un essai audio sur l’évolution intitulé The Sounds of Earth, ainsi que des salutations dans une soixantaine de langages humains (et en langage baleine) ».Imaginons.Imaginons que l’occasion soit donnée à une anthropologue de rejouer ce geste. Que choisirions-nous d’envoyer dans l’espace ? Quel serait notre message ? Comment nous accorderions-nous sur son contenu ? Qu’est-ce qui, au regard de l’horizon qui est le nôtre aujourd’hui, mériterait d’être sélectionné, transmis ?
Dans un monde global accéléré et violent, l’anthropologie du contemporain se donne les avenirs pour objet : pour tâcher de rendre ce monde plus intelligible, en tant que les avenirs – socialement situés, pluriels, conflictuels – font pleinement partie de ce qui le compose et de ce avec quoi nous le fabriquons. Il s’agit de regarder, dans le cadre d’une anthropologie politique pragmatique des espaces, comment les gens fabriquent ou contestent des espaces – pour faire des choses ensemble ou guerroyer. Or, pour fabriquer des espaces, les gens mobilisent des temporalités qui sont elles-mêmes spatialisées. Pour faire un quartier, un pays, pour annexer une région, les gens mobilisent des passés pas passés ou pleinement disponibles et/ou des avenirs spatialisés, qui souvent se font écho. Les manières d’ancrer spatialement les temporalités sont prises dans des rapports de pouvoir, et sont des prises de position politique. Cet article se consacre donc aux moyens de décrire les politiques des spatialisations des temporalités avec lesquelles les gens fabriquent ou contestent des espaces dans le contexte russe : comment dresser la topographie plurielle, conflictuelle, des temporalités mobilisées dans la fabrique des espaces ? Sa politique est de ne pas dessiner de frontières conceptuelles ou analytiques, ni de se contenter du pire-qui-est-toujours-probable, mais de laisser leur place à des descriptions ouvertes, et à des pratiques contre-hégémoniques de spatialisations de l’avenir : à d’autres possibles.
La cité-jardin Sokol à Moscou se présente à la fois comme parfaitement unique et comme exemplaire des conditions de logement et de voisinage qui vont se succéder dans la capitale durant la période soviétique et les deux décennies suivant la fin du régime. Le comparatisme diachronique permet de relativiser le rôle de la forme urbaine dans la constitution des formes d'urbanité et de rapports sociaux. Il relativise aussi les débats sur la supposée spécificité d'un sujet soviétique. En proposant la notion de régimes de voisinage, on propose d'élargir la check-list de ce avec quoi l'on voisine, ici ou ailleurs.
Aborder la ville à partir des stratégies et des enjeux patrimoniaux qui prennent une telle importance aujourd'hui un peu partout dans le monde permet plus largement de mettre en évidence les différentes logiques des politiques, des architectes, des urbanistes et des habitants, leurs confrontations, leurs articulations à l'oeuvre dans la configuration des espaces d'aujourd'hui. Les différentes situations urbaines, décrites et présentées ici, mettant en scène, en image et en récit du patrimoine dit matériel comme immatériel, font apparaître les conditions qui permettent ou pas, selon les acteurs. des formes d'identification à des espaces anciens ou récents (quelquefois même dès leur conception), et les modalités par lesquelles les significations données au passé (sans cesse renouvelées) peuvent susciter adhésions ou conflits. Cette dimension performative du patrimoine peut faire advenir. dans certains cas, de nouvelles formes de localisme (quelque fois à une échelle micro mais toujours en relation avec des contextes beaucoup plus larges), comme de nouveaux regroupements de citadins. Trois parties vont interroger cette mise en jeu du patrimoine à travers le déroulement de différentes logiques. La première partie traite de l'ordonnancement social et symbolique des centres villes à travers des mises en forme du passé. Des études de cas menées à Berlin. Beyrouth. Casablanca, Paris, s'intéressent aux modes de sélection et de transmission d'une mémoire, à partir du legs architectural, concernant aussi bien le passé de la ville que celui du pays. Une seconde partie traite de la fabrique de nouvelles images de ville à partir de mises en scènes architecturales. culturelles et artistiques. Une troisième partie traite des modes de définition de secteurs de ville à travers des mises en récits patrimoniales faisant converger différentes séquences urbaines. Ces formes de reterritorialisation essayent de rétablir. dans un monde globalisé, des repères temporels et spatiaux et ainsi de (re)qualifier leur environnement. (4ème de couverture)
Premier ouvrage d’Alice Goffman, On the Run est le résultat d’une ethnographie menée dans un quartier afro-américain – ni le plus pauvre ni le plus violent – de Philadelphie. Goffman replace son travail dans la longue durée des rapports d’exploitation et de domination de race et de classe aux États-Unis, de l’esclavage à la ségrégation, de la « grande migration » vers...
Avec une approche pragmatique considérant les émotions dans leurs dimensions politique et performative, la thèse – fondée sur des matériaux historiques et un terrain immersif dans une cité-jardin moscovite classée, soumise à des logiques spéculatives exacerbées, et dont les habitants se sont constitués en autogestion politique – décrit l'art de savoir vivre avec son temps dans la Russie des années 1990-2000. Pour cela, elle déploie le temps lui-même : faillé, accéléré, suspendu ; syncrétique, hétérogène, polymorphe. Et explicite ce que le temps fait à l'espace – et ce que l'espace fait au temps. Elle examine, notamment, la fabrique performative de la communauté et du localisme ; la brutalité du changement, ce que l'argent fait au temps, mais aussi ce que le temps fait à l'argent et à son hyper-puissance du moment ; les débats politiques du micro au macro, les anciennes et nouvelles valeurs et leur valeur pratique et morale à l’aune du présent et de ses avenirs, de ses passés, de ses avenirs d’antan ; comment la présence des absences – des morts de la Grande Guerre Patriotique, des acteurs et des victimes des répressions – (dé)structurent les rapports sociaux, et comment on les organise socialement ; les scansions du rythme effréné et perpétuellement catastrophiste de la société globale ; l'In-fini de l'instant. Ce travail défend la monographie comme méthode et comme genre : accès à des niveaux de réel autrement inatteignables ; non-renoncement au surcroît d’intelligibilité offert par la posture monographique, laquelle permet de montrer les processus d’action/rétroaction des enjeux de différents domaines de la vie sociale saisie dans la pluralité croisée de ses dynamiques.
Le laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (Lesc–UMR 7186, CNRS/Université Paris Nanterre), propose un dispositif de soutien aux candidat.es au concours 2025 au poste de chargé.es de recherche au CNRS se reconnaissant dans les perspectives scientifiques du laboratoire et souhaitant leur rattachement au Lesc en cas de recrutement. Plus d'informations ici