[English version below]
Ethnomusicologue africaniste, Sandrine Loncke est maître de conférences au Département de musique de l’Université Paris 8 – Saint-Denis, et membre du Centre de recherche en ethnomusicologie (CREM-LESC, CNRS).
Que ce soit par l’écrit, l’audiovisuel ou le multimédia, elle place au cœur de ses préoccupations l'étude et la transmission des patrimoines immatériels des sociétés minoritaires.
Lors d'un premier travail d'enquête mené auprès des Peuls JelgooBe du nord-Burkina Faso, elle analyse le rapport à la musique et les conceptions esthétiques de cette société à la lumière de son mode d’organisation socio-politique stratifié et de son système de valeurs (1997, 1999, 2001).
C’est ensuite à une société nomade lignagère qu’elle consacre ses recherches, avec une étude des rapports entre performance musicale et processus de constructions identitaires chez les Peuls WoDaaBe du Niger (2009, 2015). Ses travaux chez les WoDaaBe ont aussi donné lieu à un ouvrage photographique en collaboration avec Jean-Marc Durou (2000), et à un film dédié à leurs cérémonies rituelles : La danse des Wodaabe (Grand Prix Nanook-Jean Rouch 2010).
Actuellement engagée dans un programme de recherche pluridisciplinaire, elle documente les pratiques musicales des sociétés du Moyen-Chari, au sud du Tchad (Programme “DOBES –Documentation of endangered langages”, en partenariat avec les Universités Humboldt de Berlin et Berkeley).
Africanist ethnomusicologist, Sandrine Loncke is an associate professor in the Department of Music at University of Paris 8 – Saint-Denis, and member of the Centre for Research in Ethnomusicology (CREM-LESC, CNRS).
Whether it be written, audio-visual, or multimedia, she puts the study and transmission of minority societies’ immaterial heritage at the forefront of her research.
During an initial field study led among the Fula JelgooBe people of Northern Burkina Faso, she analysed the relationship between music and aesthetic conceptions in terms of the society’s stratified socio-political organisation and its value system (1997, 1999, 2001).
She then focused her research on a nomadic society, conducting a study on the relationship between musical performance and the processes of constructing in WoDaaBe Fulani communities in Nigeria (2009, 2015). Her work there led to a photographic publication in collaboration with Jean-Marc Durou (2000), and a film dedicated to their ritual ceremonies: Dance With the Woodabes (Grand Prix Nanook-Jean Rouch 2010).
Currently participating in a multidisciplinary research project, Loncke is documenting musical practices in Moyen-Chari societies, in the south of Tchad (DOBES – Documentation of Endangered Languages, in partnership with Humboldt University of Berlin and UC Berkeley).
Instances scientifiques et administratives
Responsabilités universitaires
Membre élue de sociétés savantes
Membre de Groupes d’études
Expertises, Jurys, Comités de sélection
Expertises (reviewer) pour des revues scientifiques
Sandrine Loncke est enseignante-chercheure à l’Université Paris 8 (Département de Musique, UFR Arts), où elle dispense des cours d’ethnomusicologie portant sur les rapports entre musique et société en Afrique subsaharienne, sur l’analyse des systèmes musicaux de tradition orale et sur le documentaire musical.
Ses cours sont ouverts aux étudiants suivant une formation artistique ou en sciences humaines et sociales.
Au cœur du Sahel nigérien, loin de toute voie d’accès, des milliers de Peuls nomades wodaabe se réunissent chaque année pour un vaste rassemblement cérémoniel, dont le rituel central est appelé geerewol. Sept jours et sept nuits durant, suivant le cycle du soleil et sous l’étroit contrôle des anciens, deux fractions de lignages différents se livrent une guerre dont les seules armes sont le chant et la danse. L’enjeu de cette guerre, son but officiel : le vol des femmes. Son ultime finalité : se séparer dans la paix. Privilégiant une écriture qui restitue à la fois les dialogues et le cheminement de l’enquête à la manière d’une intrigue policière, ce livre est le récit vivant de la façon dont s’élabore une recherche de terrain en ethnomusicologie. Centrée sur le chant et la danse, l’enquête nous conduit peu à peu au cœur des représentations culturelles et des conceptions esthétiques de cette société ouest-africaine d’éleveurs nomades. Chemin faisant, on y découvre un système d’initiation et de représentation du monde qui fut sans doute caractéristique de l’ensemble du monde peul avant son islamisation. Au-delà d’une simple monographie sur les cérémonies inter-lignagères des Peuls Wodaabe, cette étude soulève également des interrogations anthropologiques fondamentales : quelles dynamiques gouvernent au sein des sociétés humaines l’émergence d’identités et de différences stylistiques ? Comment la musique et la danse sont-elles l’expression esthétique de différentes manières d’être ensemble ? Pourquoi le rituel et la performance artistique collective sont-ils des espaces privilégiés pour faire société ? Le livre est accompagné d’un dvd-rom comprenant un important corpus de documents sonores et audiovisuels, ainsi que le film documentaire plusieurs fois primé La danse des Wodaabe. Prix Musiques du monde de l’Académie Charles Cros, 2017.
Les pasteurs peuls du Jelgooji (nord-Burkina Faso) pratiquent un genre vocal, « le doohi », que tous s’accordent à considérer comme pure activité ludique réservée aux seuls jeunes gens. Du point de vue aussi bien formel que des règles de conduites qui l’entourent, il apparaît cependant qu’il participe d’une dynamique de production de différences entre communautés villageoises, entre groupes d’âge, entre hommes et femmes, qui contribuent finalement à l’instauration et la perpétuation d’un ordre social et du système de valeurs caractérisant l’ensemble du groupe. L’ouvrage est accompagné d’un CD de 18 plages illustrant le répertoire étudié : chants de femmes et variantes locales de doohi. Prix international latin d’Études musicales, 1999 (Premio internazionale Latina di studi musicali, 1999).
Dans leur vie quotidienne comme au cours de leurs somptueuses cérémonies annuelles, les Peuls Wodaabe du Sahel nigérien, plus connus sous le nom de « Bororos », perpétuent et célèbrent jusqu’à ce jour un idéal de vie foncièrement ascétique, qui valorise avant tout l’adaptation plutôt que l’emprise sur le milieu, aussi extrême soit-il. Cet idéal multimillénaire n'est autre que l’élevage nomade. Il est né de l’alliance entre l’Homme et l’animal, qui accepta de se laisser domestiquer. Partout l’on clame aujourd’hui qu’un tel mode de vie est voué à disparaître de la surface de la terre. Au sein du monde peul, les Bororos en sont les derniers représentants. Par delà les vicissitudes de l’histoire, ils n’ont jamais cessé de marcher sur la trace de leurs troupeaux. Accompagnant les photographies de Jean-Marc Durou, ce texte ethnographique suit la vie d’une famille nomade durant un cycle de quatre saisons.
By drawing on a Fulbe vocal music style, this article shows that to explore a musical genre as a whole, it is essential to take into account vernacular musical categories that are used to characterize a good performance. Not only does it allow for access to the performers’ aesthetic concepts, but also permits revealing of the cultural representations that underlie their production.
Les Peuls Wodaabe du Niger possèdent un répertoire de chants identitaires qu’ils considèrent comme la marque sonore figée de leurs subdivisions lignagères. La musique jouerait donc dans cette société le rôle d’un support de mémoire. Mais le recueil de l’histoire orale révèle qu’une telle mémoire relève principalement de représentations mythiques visant à fonder la croyance en une ascendance commune. Sur le plan musical, le potentiel de variation des chants lignagers, ainsi que l’absence d’un modèle de référence unique partagé par les chanteurs, permettent en outre de postuler que ce répertoire vocal est en réalité le fruit d’un processus continu d’homogénéisation et de différenciation. C’est finalement en situation d’interactions lors des performances cérémonielles que les groupes lignagers sont le plus à même de se définir musicalement les uns par rapport aux autres. Cet article pose ainsi l’hypothèse que, dans les sociétés politiquement non centralisées où il n’existe pas de transmission institutionnalisée de la musique, l’évolution des formes musicales, reflet de l’histoire en acte, doit être pensée indépendamment de tout modèle établi, comme un processus que, empruntant à la linguistique, l’auteur qualifie en termes de « dialectalisation ».
À partir de l’exemple d’un répertoire de musique vocale peul, cet article illustre la façon dont les catégories musicales vernaculaires permettent à l’ethnomusicologue d’appréhender la forme musicale, non seulement en restituant l’intentionnalité esthétique de ses dépositaires, mais également en rendant compte des conceptions culturelles qui la sous-tendent et la motivent.
Il est d’autant plus aisé d’associer de façon essentialiste les Peuls à l’Islam que, outre qu’ils ont été à l’initiative des grands djihâds sahéliens du XIXe siècle, il semble ne rester aucune trace tangible des systèmes de croyances qui auraient pu être les leurs avant leur islamisation. C’est oublier qu’il existe, dans tous les dialectes peuls, une classe nominale énigmatique qui ne comprend que trois termes — le feu, le soleil et la vache —, à propos de laquelle anthropologues et linguistes ont émis l’hypothèse qu’elle renvoyait au champ sémantique du religieux. Confrontant les données de l’enquête ethnographique, de la linguistique et de la mythologie, cet article revisite cette hypothèse à l’aune de l’un des derniers grands rituels initiatiques encore pratiqué par une société peule, la geerewol des nomades wodaabe du Niger.
À travers 200 photographies en couleur, cet album témoigne de la vie quotidienne de ces deux sociétés nomades que sont les Touaregs et les Peuls Wodaabe du Niger. Alors que 2006 est "l’année du désert", il rend également hommage à Edmond Bernus à travers des textes inédits signés par Caroline Bernus, d’après des notes de son père.
Cette interface présente les chants et les danses qui jalonnent le déroulement des grands rassemblements cérémoniels des Peuls nomades Wodaabe du Niger : daddo ngaanyka. Elle se compose de trois parties, ou trois types de documents, qui synthétisent un travail de recherche effectué sous la tutelle du CNRS entre 1997 et 2008 : 1/ une partie « AUDIO » de cinquante plages musicales — et notamment les chants identitaires des treize lignages wodaabe du Niger (jeldugol) —, enrichie d’annotations textuelles, illustrations photos et système de balises permettant d’appréhender et de se déplacer dans la structure formelle des pièces ; 2/ en complément du film documentaire La danse des Wodaabe qui accompagne le livre de Sandrine Loncke, une partie « VIDÉO », constituée de neuf documents inédits illustrant les principales séquences chorégraphiques et rituelles qui structurent une cérémonie de daddo ngaanyka : danses ruumi, représentations rituelles de yaake et de geerewol, attaque rituelle nocturne inaugurant le lancement d’une cérémonie (dooynaago), dernière yaake avant dispersion (ndubbitaanga), etc. ; 3/ enfin, une partie « AUTRE » référençant différentes ressources sur le monde peul. Cette interface accompagne le livre du même nom publié aux éditions Société d’ethnologie.
The project documents the Laal language and culture. Laal is a language isolate spoken by the ca. 800 speakers in Gori and Damtar, two villages of the Moyen-Chari region of southern Chad, as well as in the Laal community settled in various towns in the country. All data were collected between 2011 and 2018. The archive contains audio and video recordings of interviews, daily life activities, stories, cultural events, songs and dances, and linguistic elicitation. Many recordings are annotated in ELAN and Toolbox-files. The archive also includes the following analytical resources: a Laal-French-English dictionary, a Laal orthography guide, a bilingual Laal-French text collection, an ethnohistorical monograph, updated maps of the Laal-speaking regionan ethnobotanical database, a botanical monograph, and musical transcriptions. The PIs of the project are Florian Lionnet and Tom Güldemann. Researchers on the team are Florian Lionnet (linguistic documentation), Sandrine Loncke (ethnomusicology), Rémadji Hoïnathy (anthropology), and Ngomdé Djasnabaye (ethnobotany).
Ce CD accompagne le livre du même nom publié aux éditions Libreria Musicale Italiana.
Sur les rives du fleuve Chari, au Sud du Tchad, Florian Lionnet documente le láàl, un isolat linguistique parlé dans deux petits villages et menacé de disparition à plus ou moins court terme. Sur les pas de ce jeune chercheur, le film part à la rencontre des villageois pour explorer leur relation aux langues. Pour l’heure, les habitants de la région parlent encore couramment entre cinq et sept langues. C’est une humanité profondément multilingue qui se révèle ainsi, faite d’une myriade de sociétés qui, chacune, n’a de cesse d’encoder dans sa langue ses savoirs, sa culture, et au-delà, toute une vision du monde. Mais pour combien de temps encore ? Grand Prix Dragoslav Antonijević (29th International Festival of Ethnological Film, Belgrade, 2020), Best Scientific Doc Award (24th Pärnu Film Festival, Estonie, 2020), Merit Award of Awareness (Awareness Film Festival, Los Angeles, 2020), Prix spécial du jury (Festival Curieux Voyageurs, Saint-Étienne, 2021), Mention spéciale (Rovereto Archeologia Memorie Film Festival, Italie, 2021).
Ce coffret de DVD présente douze films remarqués par de grands festivals internationaux comme le festival Jean Rouch à Paris. Le film de Sandrine Loncke sur les cérémonies rituelles des Peuls nomades Wodaabe y figure sous deux versions : le long-métrage initial de 90 minutes en français (La danse des Wodaabe, format 4:3) et la version télévisée internationale de 52 minutes (Wodaabe. Dance instead of War, format 16:9). Le coffret est accompagné d’un livret de 52 pages comprenant un texte de Bernard Lortat-Jacob : « Filmer la musique ».
In the heart of the Nigerien Sahel, far from any urban center, thousands of Fulbe Wodaabe nomads come together every year to celebrate their cultural identity in a vast ceremonial gathering named Daddo. For seven days and seven nights, following the solar cycle, two lineages are opposed in a genuine ritual war, with for only weapons song and dance. The stakes of war, the clear challenge: stealing women. The ultimate purpose: to break in peace after having mutually expressed recognition of cultural conformity. According to the Wodaabes, giving up these ceremonies - the only gathering where community links are woven - would entail their dissolution as an original cultural entity. But the ecological crisis striking Sahel makes the organization of such gatherings more and more difficult. Fearing that the tradition may die out, Ouba Hassane, 40, and his wife Kedi, 39, chose to appear on screen and relate their experiences and understanding of the ritual. The film follows as Ouba teaches his son about Wodaabe traditions, myths, and religious beliefs. The couple’s commentary, along with that of the ceremony participants (dancers, young women, those in charge of the youth, societal elders) gradually shed a whole new light on the ritual and sumptuous choreographic cycle that plays out before our eyes. Grand Prix Nanook (Paris, Festival International Jean Rouch, 2010), Prix Festival du Film de Chercheur (Nancy, 2010), Coup de cœur (Saint-Malo, Festival Étonnants Voyageurs, 2010), Sélection au Catalogue National des Films Documentaires (BPI-Beaubourg / CNC, 2011).