Les chamanes djeorometxi (groupe autochtone résidant dans le territoire multiethnique de la Terra Indígena Vale do Guaporé dans l’État de Rondônia au Brésil) encouragent les jeunes garçons à arremendar certains animaux, c’est-à-dire à souffler, crier et hurler ce qu’ils appellent des « langues animales ». Parallèlement, à l’aide d’une gourde, ils les baignent avec des folhas de bichos, un mélange de feuilles et de racines qui imprègne le corps de l’initié avec l’odeur de son futur gibier. Cette procédure, apprise en contexte rituel, est ultérieurement répétée par les intéressés pour assurer leur succès à la chasse. La pratique d’arremendar et le bain de folhas de bichos relèvent d’une même logique : ils servent à communiquer au chasseur les affections des animaux afin de les attirer et de les tromper.
Cependant, s’exprimer et sentir comme les animaux présente, pour le chasseur, un risque perçu comme potentiellement mortel. Abandonnant une série d’éléments qui font de lui un être humain au sein de la parenté, le chasseur doit en effet assumer un corps doté d’affections différentes, qui se déplace et exhale des odeurs inhabituelles. En pratiquant ces langues animales, le chasseur traite comme un parent non pas celui avec qui il partage ordinairement du tabac ou de la chicha, ou qui est peint comme lui avec du génipa ou de l’huile de palmier patoá (Oenocarpus bataua), mais celui qui est perché sur une branche, caché dans les sous-bois ou suspendu par la queue… En approfondissant ces nuances, cette présentation réfléchira sur ces pratiques cynégétiques, en insistant notamment sur la question des risques et du rôle de la transformation et de la prédation dans ce contexte amazonien.
Cliché : Jeunes gens s’apprêtant à se baigner avec des folhas de bichos / © Gabriel Sanchez, 2022.
Le séminaire de l’EREA (Enseignement et recherche en ethnologie amérindienne) est un espace de discussion, ouvert à tout public, flexible et modulable, qui a pour vocation de stimuler les échanges entre la formation américaniste du département d’anthropologie de l’université Paris Nanterre et les chercheurs du Centre ainsi que des invités extérieurs. Tout en étant un foyer de réflexion sur les recherches américanistes en cours, il sert également de plate-forme pour la divulgation des travaux des doctorants, post-doctorants et chercheurs associés.
Sous forme de présentations individuelles, de cycles thématiques ou de demi-journées d’étude, il apporte ainsi un espace de recherche complémentaire aux réunions du Séminaire d’anthropologie américaniste (SAA) et au Groupe d’enseignement et de recherche sur les Mayas et la Mésoamérique (GERM).
Certaines séances sont disponibles en replay sur la chaîne Erea de Canal U.
Organisation : Valentina Vapnarsky, Aline Hémond, Philippe Erikson et Vincent Hirtzel
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Le laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (Lesc–UMR 7186, CNRS/Université Paris Nanterre), propose un dispositif de soutien aux candidat.es au concours 2025 au poste de chargé.es de recherche au CNRS se reconnaissant dans les perspectives scientifiques du laboratoire et souhaitant leur rattachement au Lesc en cas de recrutement. Plus d'informations ici