Avec Siv Lie*
Ce séminaire explore la politique du silence dans la commémoration du génocide. Les Manouches français, qui sont mieux connus pour leur pratique du jazz manouche, étaient largement ciblés par des décrets génocidaires sous les régimes nazi et vichy en France pendant la deuxième guerre mondiale. Les Manouches sont souvent caractérisés comme réticents à commémorer ce génocide, mais on peut trouver beaucoup d’exceptions dans les témoiganges, le discours quotidien, et la musique. Le travail des musiciens en particulier suggère des changements dans les attitudes concernant la mémoire des morts, ainsi qu’une multiplicité d'approches à la mort et aux traumatismes parmi les communautés et les individus manouches. Certains visent aussi à contribuer à des luttes contre un long héritage de racisme antitsigane en France et ailleurs. Ce séminaire suivra le fil des recherches entreprises depuis quelques années et du travail de terrain en cours pendant l’automne 2023.
* Siv Lie est professeure associée de musique et professeure associée affiliée d’anthropologie à l’Université du Maryland (États-Unis). En 2023-24, elle est Fellow à l’Université de Strasbourg Institute d’Études Avancées dans le Laboratoire interdisciplinaire en études culturelles (LinCS). Son travail s’est centré largement sur l’utilisation des pratiques expressives par les populations romani afin de promouvoir leurs intérêts socio-politiques et économiques. Son premier livre, Django Generations: Hearing Ethnorace, Citizenship, and Jazz Manouche in France (University of Chicago Press, 2021), est issu d’une décennie de recherches sur le jazz manouche, un genre inspiré par la musique du guitariste manouche Django Reinhardt. Cet ouvrage montre les façons dont les tensions entre les identités raciales et l’appartenance nationale se déploient dans les industries françaises du jazz. En tant que cofondatrice et coordinatrice de l’Initiative pour la musique romani à l’université de New York, elle a réuni des universitaires, des artistes et des membres de la communauté afin de sensibiliser le public aux musiques et cultures romani. Elle est également conservatrice de la partie « Musique » de RomArchive, les premières archives numériques des arts et cultures romani principalement dirigées par des personnes romani.
Le séminaire du CREM (Centre de recherche en ethnomusicologie) a lieu deux lundis par mois, de 10h à 12h. Les chercheurs (doctorants compris) membres du CREM ou invités de passage y présentent leurs travaux en cours. Les présentations durent 50 minutes, et sont suivies d’une pause café et d’une heure de discussion.
Occasionnellement, le séminaire prend la forme d’un atelier rassemblant plusieurs chercheurs autour d’un thème commun. Il dure alors un après-midi ou bien une journée complète.
La participation au séminaire est ouverte à tous. Il fait par ailleurs partie du cursus des Master d’ethnomusicologie des universités Paris Nanterre et Paris 8 Saint-Denis.